Le droit de l'urbanisme dans la turbulence des réformes

Le droit de l'urbanisme dans la turbulence des réformes

Publié le : 05/12/2011 05 décembre déc. 12 2011

Il était légitime de penser que le droit de l’urbanisme - et du même coup les praticiens – se devait de prendre le temps de digérer les dernières réformes qui modifient des chapitres entiers du code de l’urbanisme.

Réformes en droit de l'urbanisme: fiscalité, surfaces, autorisations d’urbanisme, documents d’urbanisme…On pense notamment au régime des autorisations d’urbanisme, entièrement refondu par l’ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme.

Le régime des documents d’urbanisme est également concerné après avoir été sensiblement modifié par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite loi « Grenelle II ».

Il n’en est rien. De nouvelles réformes du droit de l’urbanisme sont sur le point d’aboutir.


Réforme de la fiscalité de l’aménagement (1)
C’est d’abord l’ensemble du régime des taxes et participations d’urbanisme qui a été entièrement refondu par la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finance rectificative pour 2010.

Selon les pouvoirs publics, les enjeux du nouveau dispositif sont :

- d’améliorer la compréhension et la lisibilité du régime ;
- de simplifier en réduisant le nombre d’outils de financement ;
- de promouvoir un usage économe des sols et contribuer à la lutte contre l’étalement urbain ;
- d’inciter à la création de logements.

Le nouveau dispositif a également pour objectif d’être économe des deniers publics en réduisant le coût de gestion de l’impôt.

Ce qui est notable, c’est que l’ensemble des mesures proposées a été conçu pour donner une très grande marge de manœuvre aux collectivités territoriales et pour pouvoir être utilisé de manière différenciée sur l’ensemble du territoire en s’adaptant à la taille, aux caractéristiques et aux politiques d’aménagement propres à chaque collectivité.

Le nouveau régime repose sur deux taxes qui se complètent :

  • la taxe d’aménagement qui porte les objectifs de simplification et de rendement en permettant le financement des équipements publics nécessités par l’urbanisation ;
  • Le versement pour sous-densité qui porte l’objectif de lutte contre l’étalement urbain et incite à une utilisation économe de l’espace.
La taxe d’aménagement se substitue à la taxe locale d’équipement (TLE), la taxe départementale des espaces naturels et sensibles (TDENS), la taxe départementale pour le financement des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (TDCAUE), la taxe spéciale d’équipement du département de la Savoie, la taxe complémentaire à la TLE en région d’Ile-de-France et au programme d’aménagement d’ensemble (PAE).

Réservé aux zones U et AU des PLU ou des POS, le versement pour sous-densité (VSD) est un outil destiné à permettre une utilisation plus économe de l’espace et à lutter contre l’étalement urbain.

Il entrera en vigueur le 1er mars 2012 et le 1er janvier 2014 à Mayotte. Les collectivités territoriales doivent prendre les délibérations nécessaires à la mise en œuvre du dispositif avant le 30 novembre pour l’année suivante et donc avant le 30 novembre 2011 pour la première mise en œuvre en 2012.

Au 1er janvier 2015, le dispositif de financement de l’aménagement comprendra donc :

- la taxe d’aménagement (TA)
- le projet urbain partenarial (PUP)
- Le financement en zone d’aménagement concertée (ZAC)
- La participation pour réalisation d’équipements publics exceptionnels (PEPE)
- Le versement pour sous-densité (VSD).



Réforme des surfaces (2)
Quasiment dans le même temps, une réforme des surfaces est opérée.

L’article 25 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement a autorisé le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance pour unifier et simplifier la définition des surfaces de plancher prises en compte dans le droit de l'urbanisme. Cette ordonnance doit être publiée dans un délai de dix-huit mois suivant la publication de la loi portant engagement national pour l'environnement, soit avant le 12 janvier 2012.

Ce projet de réforme vient de recevoir une première traduction puisque l’ordonnance en question a été publiée au journal officiel du 17 novembre dernier. Il s’agit de l’ordonnance n° 2011-1539 du 16 novembre 2011 relative à la définition des surfaces de plancher prises en compte dans le droit de l'urbanisme.

Ce texte a pour objectif de définir la nouvelle surface comme étant la surface de plancher close et couverte, sous une hauteur de plafond supérieure à 1,80 mètre. Cette surface est calculée à partir du nu intérieur pour ne pas pénaliser les efforts d'isolation par l'intérieur ou l'extérieur des bâtiments. Un décret en Conseil d'Etat précisera notamment les conditions dans lesquelles peuvent être déduites les surfaces des vides et des trémies, des aires de stationnement, des caves ou celliers, des combles et des locaux techniques, ainsi que, dans les immeubles collectifs, une part forfaitaire des surfaces de plancher affectées à l'habitation.

Les projets nouveaux seront soumis à la nouvelle définition de la surface de plancher à compter du 1er mars 2012 pour laisser aux professionnels le temps de s'adapter à cette nouvelle définition. Cela ne concernera pas les demandes d'autorisation en cours d'instruction au 1er mars 2012. Ces demandes demeureront instruites selon les dispositions faisant référence à la surface hors œuvre applicables avant le 1er mars 2012.

A compter de la publication de l'ordonnance, les modifications des règlements des plans locaux d'urbanisme, plans d'occupation des sols et plans d'aménagement de zone effectuées en vue de prendre en compte la nouvelle définition de la surface de plancher pourront être approuvées via la procédure de modification simplifiée.



Modifications apportées à la réforme des autorisations d’urbanisme (3)
L’article 25 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement autorise également le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance pour apporter au régime des permis de construire et des autorisations d'urbanisme, issu de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme et de l'ordonnance n° 2005-1128 du 8 septembre 2005 relative aux monuments historiques et aux espaces protégés, les corrections dont la mise en œuvre de la réforme pourrait faire apparaître la nécessité.

Cette ordonnance doit être publiée dans un délai de dix-huit mois suivant la publication de la loi portant engagement national pour l'environnement, soit avant le 12 janvier 2012.

A la différence de la réforme des surfaces, l’ordonnance annoncée n’a pas encore été publiée.

Les principaux ajustements proposés concerneraient les lotissements. La réforme de 2007 a, en effet, modifié le régime des lotissements mais a laissé subsister certaines difficultés d’application liées, notamment, au fait qu’elle a soumis les lotissements soit à une déclaration préalable, soit à un permis d’aménager, selon des modalités difficilement applicables en pratique.

L’article L. 442-1 du code de l’urbanisme serait modifié afin de préciser et clarifier la définition du lotissement. D’une part, il supprimerait l’obligation de prendre en compte les divisions intervenues dans les dix années précédentes, ce qui rendrait plus clair le régime juridique auquel une division est soumise. D’autre part, il préciserait qu'un lotissement peut concerner plusieurs unités foncières contiguës.

L’article L. 442-2 serait également modifié, qui détermine les critères permettant de fixer, par voie réglementaire, les champs respectifs des lotissements soumis à permis d'aménager et de ceux soumis à déclaration préalable. En vertu des dispositions actuelles, la déclaration préalable s’applique aux lotissements de moins de trois lots ainsi qu’à tous ceux qui ne comportent pas la création de voies ou espaces commun tandis que le permis d’aménager est requis dans les autres cas. Il est prévu que, pour déterminer le nombre de lots créés sur une unité foncière, le calcul doit prendre en compte les lots créés antérieurement, en remontant jusqu’à dix ans en arrière. Du fait de ce mode de calcul, les champs respectifs de la déclaration préalable et du permis d'aménager sont peu lisibles, posent parfois de réels problèmes pratiques et sont mal compris. Il serait donc proposé de conserver les critères de la localisation de l’opération et de la création de voies et d’équipements communs, mais de supprimer l’obligation de remonter sur les dix années précédant une division en limitant le champ de la déclaration préalable aux seuls lotissements sans travaux, quel que soit leur nombre de lots.

Les autres mesures de la réforme devraient permettre de clarifier ou sécuriser certaines dispositions relatives au permis de construire dont l'application pose aujourd'hui des difficultés.

L'essentiel des dispositions issues de cette réforme étant codifiée dans la partie réglementaire du code de l'urbanisme, l'ordonnance sera accompagnée d'un décret et c'est l'ensemble des deux textes qui assurera la cohérence des ajustements apportés à la réforme de l'application du droit des sols entrée en vigueur au 1er octobre 2007.


Réforme des documents d’urbanisme

A ces différentes réformes en cours doivent être ajoutées :

  • le projet de décret pris pour l’application des articles 17 et 19 de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (Grenelle II) et pour l’application des dispositions d’urbanisme de la loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche ; ce projet de décret vient préciser l’application des dispositions de la loi « Grenelle II » notamment, relatives aux SCOT et aux PLU ;
  • un projet d’ordonnance – devant être publiée avant le 12 janvier 2012 - relative à l’élaboration et l’évolution des documents d’urbanisme ; l’article 25 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (ENE) habilite là encore le gouvernement à procéder par voie d’ordonnance, d’une part, à une nouvelle codification du code de l’urbanisme, qui doit, en principe, être à droit constant et, d’autre part, à une réforme des procédures d’élaboration et d’évolution des documents d’urbanisme, afin de les clarifier et les simplifier.
A ces initiatives gouvernementales viennent s’ajouter des initiatives parlementaires comme par exemple la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, enregistrée à la Présidence du Sénat le 4 août 2011. L'article 20 de cette proposition de loi vise à permettre d'instaurer, dans les plans locaux d'urbanisme (PLU), en zone U et I AU, des secteurs de projets. Dans ces secteurs, les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) seraient privilégiées par rapport au règlement, afin de donner de la souplesse. Dans ces secteurs, ces OAP devront préciser 4 thèmes (usages du sol/fonctions économiques, sociales et environnementales, fonction de continuité écologique, prescriptions voiries et réseaux divers, formes urbaines) en définissant des objectifs de mixité des fonctions, d'orientations programmatiques de construction, de morphologie urbaine et de densité dans le secteur de projets. Elles se substitueront au règlement dans les secteurs de projets.


Index:
(1) Ces développements sont tirés du document établi par le Ministère de l’écologie, du développement durable des Transports et du Logement, Présentation de la réforme de la fiscalité de l’aménagement, janvier 2011.
(2) Ces développements sont tirés du Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2011-1539 du 16 novembre 2011 relative à la définition des surfaces de plancher prises en compte dans le droit de l'urbanisme, ainsi que de l'ordonnance n° 2011-1539 du 16 novembre 2011 relative à la définition des surfaces de plancher prises en compte dans le droit de l'urbanisme.
(3) Ces développements sont tirés du projet de Rapport au Président de la République et du projet d’ordonnance relative aux corrections à apporter à la réforme des autorisations d’urbanisme.





Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

ROUHAUD Jean-François
Avocat Associé
LEXCAP RENNES
RENNES (35)
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