Faute inexcusable de l'employeur: vers une meilleure indemnisation du salarié

Faute inexcusable de l'employeur: vers une meilleure indemnisation du salarié

Publié le : 07/09/2011 07 septembre sept. 09 2011

Dans un Arrêt du 30 juin 2011, la Cour de Cassation admet que le salarié victime de la faute inexcusable de l’employeur puisse obtenir de celui-ci, la prise en charge des frais d’aménagement du logement et de son véhicule.

Un pas vers une meilleure indemnisation du salarié



Dans un Arrêt du 30 juin 2011, la 2ème Chambre de la Cour de Cassation admet que le salarié victime de la faute inexcusable de l’employeur puisse obtenir de celui-ci, la prise en charge des frais d’aménagement du logement et de son véhicule alors même que ces postes de préjudices ne sont pas couverts par l’article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale.

1- La problématique : Traditionnellement, le salarié victime de la faute inexcusable de l’employeur ne pouvait qu’obtenir l’indemnisation des seuls postes de préjudices visés au Livre IV du Code de la Sécurité Sociale et notamment à l’article L 452-3 dudit Code. Une décision 2010/8 QPC du 18 juin 2010 rendue par le Conseil Constitutionnel pose le principe selon lequel cette même victime doit bénéficier d’une réparation intégrale de ses différents préjudices. Cette décision appelle l’attention sur les difficultés suivantes : - Eviter une double indemnisation d’un seul et même préjudice,- Déterminer les modalités d’indemnisation des préjudices non visés par le Livre IV du code précité.
2- Les préjudices réparables : L’article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale vise expressément la réparation des postes de préjudices suivants : - Souffrances physiques et morales endurées- Préjudice esthétique- Préjudice d’agrément- Préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle S’ajoute éventuellement une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation dans l’hypothèse où la victime est atteinte d’un taux d’incapacité permanent de 100%. Cette liste apparait nécessairement incomplète si on la rapproche de la nomenclature DINTILLAC qui se propose de lister les différents préjudices corporels indemnisables. Suffit-il alors de cumuler les postes de préjudices visés par l’article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale et ceux définis par la nomenclature précitée ? Répondre par l’affirmative serait une erreur. En effet, l’incidence professionnelle hors la perte de chance de promotion ainsi que le déficit fonctionnel permanent sont indemnisés par la majoration de la rente versée à la victime en application de l’article L 452-2 du Code de la Sécurité Sociale. S’agissant du déficit fonctionnel temporaire avant consolidation, un Arrêt de la Cour d’Appel de RENNES en date du 17 NOVEMBRE 2010 a considéré : « Le préjudice d’agrément qui, au sens de l’article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale est celui qui résulte des troubles ressentis dans les conditions d’existence, comprend nécessairement le déficit fonctionnel temporaire ainsi que le préjudice sexuel. » En présence d’un préjudice corporel modéré, l’apport de la décision du Conseil Constitutionnel sera la plupart du temps limité à la possibilité pour la victime d’obtenir l’indemnisation d’un préjudice esthétique temporaire avant consolidation, seul poste de préjudice non couvert par le Livre IV du Code de la Sécurité Sociale. En présence d’un handicap persistant, l’Arrêt rendu par la Cour de Cassation le 20 juin 2011 permettra à la victime de la faute inexcusable d’obtenir également l’indemnisation des frais d’aménagement de son logement et de son véhicule.
3- La détermination des modalités de l’indemnisation : S’agissant des chefs de préjudices visés par le Code de la Sécurité Sociale, la règle est simple : les indemnités sont versées à la victime par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, laquelle se retourne ensuite contre l’employeur dont la faute inexcusable a été reconnue. Qu’en est-il de la prise en charge de l’indemnisation des postes non couverts par le Code de la Sécurité Sociale ? En l’absence de jurisprudence définitivement arrêtée, plusieurs Juridictions du fond ont considéré que l’indemnisation des préjudices non visés par les dispositions du Code de la Sécurité Sociale restait à la seule charge de l’employeur sans que la CPAM soit obligée d’en faire l’avance. Dans un Arrêt du 1er février 2011, la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE donne la motivation suivante : « Il sera en outre considéré que l’avance des fonds à laquelle les Caisses sont astreintes, puis de récupération auprès de l’employeur fautif résulte exclusivement du cadre spécifique exorbitant du droit commun tel que fixé par la Loi en matière de Sécurité Sociale. Dans ces conditions, s’agissant de la réparation de préjudices ne ressortant pas de ce cadre, celle-ci doit être imposée à l’employeur fautif en fonction de critères habituellement retenus en droit commun… » Si un tel raisonnement peut être admis, il aboutit à aggraver le sort de la victime d’un employeur faisant l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire dès lors qu’elle ne bénéficiera pas du transfert du risque d’insolvabilité que supporte habituellement l’organisme social. Le principe de la réparation intégrale tel qu’il a été affirmé par le Conseil Constitutionnel ne sera alors qu’une illusion.

Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Robert Kneschke - Fotolia.com

Auteur

DANIEL Jean-Philippe
Avocat Associé
SCP FORTUNET & Associés
AVIGNON (84)
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