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Copropriétaires, êtes-vous au courant?
Publié le :
11/10/2011
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2011
Le décret du 25 juillet 2011 vient imposer aux Syndicats de Copropriétaires de réaliser des travaux destinés à permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables.
Stationnement sécurisé des vélos et équipements de recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeablesAdopté en plein cœur de l’été, le décret n° 2011-873 du 25 juillet 2011 relatif aux installations dédiées à la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables dans les bâtiments et aux infrastructures pour le stationnement sécurisé des vélos (publié au Journal Officiel du 27 juillet), est passé inaperçu.
Il risque pourtant de susciter bon nombre de réactions lorsque son existence sera connue, notamment des Syndicats de Copropriétaires, principal public concerné, ainsi que des propriétaires de locaux à usage de bureaux…
En soi, le texte n’est pas réellement une surprise. Il ne constitue en effet rien d’autre que l’un des décrets d’application de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, et notamment de son article 57, qui a créé les articles L. 111-5-2, L. 111-5-3, L. 111-6-4 et L. 111-6-5 du Code de la Construction et de l’Habitation.
L’objectif est donc de préserver l’environnement, objectif louable en soi, mais les mesures imposées risquent fort de donner une nouvelle fois aux copropriétaires l’impression d’être sans cesse mis à contribution financièrement…
Deux types de mesures sont ainsi envisagés par le décret.
- Le stationnement sécurisé des vélos :
L’article R. 111-14-4 du Code de la Construction et de l’Habitation, nouvellement créé, prévoit que les bâtiments neufs à usage principal d’habitation groupant au moins deux logements et comprenant un parc de stationnement d'accès réservé aux seuls occupants de l'immeuble, doivent être équipés d'au moins un espace réservé au stationnement sécurisé des vélos.
Le texte vise les bâtiments neufs à usage principal d’habitation comprenant au moins deux logements, de sorte que sont concernées les copropriétés, y compris celles comprenant des locaux commerciaux ou professionnels, dès lors que la résidence demeure principalement à usage d’habitation.
Pour autant, toutes les copropriétés ne sont pas visées, mais uniquement celles comportant un parc de stationnement dont l’accès est réservé aux seuls occupants de l’immeuble ; ce qui en pratique correspondra à la majeure partie des copropriétés soumises au statut de la loi du 10 juillet 1965.
Ces copropriétés devront donc comporter désormais un ou plusieurs espaces réservés au stationnement sécurisé des vélos.
Le nombre d’emplacements n’est pas fixé, la détermination de ce dernier point étant renvoyée aux soins d’un arrêté ultérieur du ministre chargé du logement. Qui précisera peut-être également ce qu’il faut entendre par "système de fermeture sécurisé" (local fermé à clé ?) et par "des dispositifs fixes permettant de stabiliser et d'attacher les vélos par le cadre ou au moins une roue" (systèmes d’attache au sol, au mur ?)…
Le calendrier d’application est en revanche d’ores et déjà fixé, de sorte que l’arrêté précité devra intervenir assez rapidement, afin d’éviter toute difficulté :
- tous les bâtiments dont la date de dépôt de demande de permis de construire est postérieure au 1er janvier 2012 doivent en être équipés ; ce qui laisse très peu de temps aux architectes pour revoir le cas échéant leur copie
- les bâtiments d’ores et déjà existants ne semblent pas concernés en tant qu’ils sont affectés à usage principal d’habitation. En revanche, ceux à usage principal de bureaux le sont, et devront donc être équipés à partir du 1er janvier 2015 ; ce qui laisse un peu plus de temps pour la mise en conformité, mais l’échéance sera vite atteinte.
Une précision – d'importance – doit néanmoins être apportée : aucune sanction n’est – tout au moins pour l’instant – prévue en cas de non-respect de ces normes. Ce qui amènera peut-être certains propriétaires de bâtiments existants à différer au maximum ces travaux qui risquent de s’avérer coûteux.
- Les équipements de recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables :
Principale mesure du décret, l’article R. 111-14-2 du Code de la Construction et de l’Habitation, lui aussi nouvellement créé, prévoit désormais que :
"Lorsque les bâtiments neufs à usage principal d'habitation groupant au moins deux logements sont équipés d'un parc de stationnement bâti clos et couvert d'accès réservé aux seuls occupants des places de stationnement, constitué notamment de places de stationnement individuelles fermées ou d'accès sécurisé, ce parc est alimenté en électricité pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables.
L'équipement réalisé est relié à un tableau général basse tension en aval du disjoncteur de l'immeuble, se situant dans un local technique électrique.
Tout ou partie des places du parc de stationnement doit être conçu de manière à pouvoir accueillir ultérieurement un point de charge pour la recharge normale d'un véhicule électrique ou hybride rechargeable, disposant d'un système de mesure permettant une facturation individuelle des consommations.
Dans ce but, des fourreaux, des chemins de câble ou des conduits sont installés à partir du tableau général basse tension de façon à pouvoir desservir au moins 10 % des places destinées aux véhicules automobiles, avec un minimum d'une place.
Ce minimum de places à équiper se calcule par rapport à la plus petite des valeurs suivantes :
- soit la totalité des emplacements exigés par le document d'urbanisme, s'il prévoit moins d'une place par logement ;
- soit la totalité des emplacements représentant en moyenne une place par logement, majorée du nombre de places exigées pour d'autres usages que le logement.
Les places desservies sont soit des places individuelles, soit un espace commun.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l'énergie précise les modalités d'application du présent article, notamment les caractéristiques de la recharge normale."
Sont donc concernées les copropriétés, y compris celles comprenant des locaux commerciaux ou professionnels, dès lors que la résidence demeure principalement à usage d’habitation.
Pour autant, toutes les copropriétés ne sont pas visées, mais uniquement celles comportant "un parc de stationnement bâti clos et couvert d'accès réservé aux seuls occupants des places de stationnement, constitué notamment de places de stationnement individuelles fermées ou d'accès sécurisé". La formulation, qui diffère donc de celle retenue pour l’équipement en espaces de stationnement sécurisé de vélos, n'est pas parfaite et suscitera sûrement quelques difficultés d'interprétation.
Semblent en effet concernées les copropriétés comportant un parking souterrain, mais pas celles avec parking extérieur non couvert, ce qui pourrait donc exclure du dispositif un nombre non négligeable de copropriétés.
Les copropriétés disposant des deux types de parcs de stationnement sont elles concernées.
Une difficulté peut se poser en revanche pour une copropriété comportant en extérieur une batterie de garages individuels fermés, donnant sur une cour commune pour permettre les accès et manœuvres. S'agit-il d'un parc au sens du décret ? Rien n'est moins sûr.
Outre cette hypothèse, l'exclusion des parkings extérieurs non couverts peut apparaître difficile à comprendre, et il y a fort à parier que le texte soit modifié, ou en tout cas que des litiges ne se fassent jour dès lors que l’un des résidents d’une copropriété avec parking extérieur non couvert souhaitera entreprendre des travaux.
La difficulté ne se posera certes pas pour les constructions neuves.
En effet, tous les bâtiments neufs dont la demande de permis de construire sera déposée après le 1er janvier 2012 devront être équipés du dispositif ; ce qui là encore laisse très peu de temps aux architectes pour le cas échéant s’adapter et modifier leurs plans, ainsi qu’aux promoteurs pour intégrer ce surcoût généré.
Car, même si là encore les arrêtés ne sont pas non plus publiés, les préconisations sont d’ores et déjà nombreuses et précises :
- tableau général basse tension en aval du disjoncteur de l’immeuble
- système de mesure permettant une facturation individuelle des consommations
- mise en place de fourreaux, chemins de câble ou conduits
- etc.
Il y a en tout état de cause fort à parier que les architectes aillent d’emblée plus loin, afin d’éviter toute difficulté, voire pour anticiper une éventuelle modification législative ultérieure, et qu’ils n’équipent systématiquement toutes les copropriétés neuves du dispositif, quel que soit le type de parc de stationnement, ce d’autant plus que le texte prévoit que peuvent être desservis comme places des "espaces communs".
Les difficultés surgiront en revanche avec les constructions existantes.
Le texte prévoit en effet que celles-ci doivent être mises en conformité à compter du 1er janvier 2015. Mais là encore, aucune sanction en cas d’absence de mise en conformité.
Cette dernière semble pourtant inévitable.
En effet, il est prévu que les travaux puissent être réalisés sur demande du copropriétaire, d’un locataire ou de l’occupant de bonne foi. Et, bien sûr, à l’initiative du Syndicat des Copropriétaires. Autrement dit, les travaux peuvent parfaitement émaner d’un simple locataire, susceptible en tant que tel de quitter les lieux à tout moment… Au risque que son remplaçant se passe des services de l’installation. Vu le coût vraisemblable des travaux en question, les dents risquent de grincer…
Certes, les frais de conception et de réalisation seront à la charge du demandeur, mais l’on imagine mal un locataire engager des dépenses d’importance qui ne lui bénéficieront pas forcément suffisamment longtemps pour lui permettre de les rentabiliser. Les propriétaires ont en revanche tout intérêt à revoir leurs contrats de bail pour adapter le cas échéant les dispositions relatives au sort, en fin de bail, des améliorations apportées par le locataire…
Le texte prévoit également la marche à suivre pour la réalisation des travaux.
Le locataire, lorsque la demande émane de lui, doit en informer son propriétaire par lettre recommandée avec accusé de réception (ou par voie d'Huissier, garantie équivalente, même si cette solution n’est pas prévue par le texte), en y joignant une information détaillée des travaux envisagés.
Le propriétaire a alors trois mois pour demander au Syndic l’inscription de cette question à l’ordre du jour de la prochaine Assemblée Générale. Les copropriétaires ont alors la faculté, lors de ladite assemblée :
- soit de s’opposer aux travaux, en saisissant le Tribunal d’Instance du lieu de situation de l’immeuble dans les six mois de la réception de la demande, en avisant le demandeur de la saisine de la Juridiction
- soit de voter les travaux pour l’ensemble de la copropriété
Il s’en infère plusieurs conséquences :
- tant que l’assemblée générale ne s’est pas prononcée, les travaux ne peuvent débuter
- le copropriétaire a trois mois pour demander inscription de la question à l’ordre du jour ; peu importe néanmoins qu’il ne le fasse pas, car la demande notifiée au copropriétaire doit être adressée en copie au Syndic ; l’éventuelle inaction délibérée ou négligente du copropriétaire se trouve ainsi contrée
- une assemblée générale devra être convoquée, et plus probablement une assemblée générale extraordinaire : les copropriétaires disposent en effet de six mois pour se prononcer à compter de la réception de la demande et éventuellement s’y opposer, à peine de forclusion. La sanction est implacable. Par voie de conséquence, si l’assemblée générale ordinaire n’était pas censée se réunir dans les six mois de la réception de la demande, il faudra soit la convoquer, soit en convoquer une extraordinaire. Le défaut de réponse dans le délai de six mois, ou l’absence de saisine du Tribunal dans ce même délai, aboutirait en effet à une impossibilité pour le Syndicat de s’opposer aux travaux
- en cas de refus le Tribunal d’Instance devra statuer ; ce choix de Juridiction peut paraître étonnant, dans la mesure où les travaux risquent d’être plus coûteux que 10.000 €, seuil de compétence de droit commun de cette juridiction, compte tenu de l’importance de ceux-ci : étude technique, gaines, fourreaux… Ce choix est peut-être motivé par le fait qu’il s’agit d’une Juridiction où la représentation par Avocat n’est pas obligatoire, mais le Syndicat des Copropriétaires en mandatera plus que vraisemblablement un, compte tenu des enjeux et des aspects techniques…
- la saisine du Tribunal d’Instance devra s’accompagner d’une notification de celle-ci au demandeur aux travaux. Aucune sanction n’est prévue. Peut-être l’objectif est-il d’éviter que le demandeur pense qu’il peut débuter ses travaux, alors même que la Juridiction a été saisie mais qu’il n’a pas encore été convoqué. Encore que cette hypothèse ne soit compréhensible qu’en cas de saisine par déclaration au Greffe, compte tenu du délai de convocation inhérent à ce mode de saisine. Tel n’est en revanche plus le cas lorsque la Juridiction est saisie par voie d’assignation, qui sera le cas le plus fréquent si un Avocat est saisi, puisqu’elle emporte en tant que telle notification. Il aurait sans doute été plus simple d’attribuer compétence exclusive au Tribunal de Grande Instance, saisi uniquement par voie d’assignation… Toujours est-il que dans le doute, l’assignation délivrée à comparaître devant le Tribunal d’Instance devra être adressée en copie par LRAR au demandeur aux travaux, et ce quand bien même l’acte lui aurait été délivré à sa personne…
- les motifs de l’opposition ne sont pas définis, ni même abordés, par le texte. On imagine néanmoins que l’opposition devra être obligatoirement motivée. On pense à des problèmes techniques, de sécurité, éventuellement d’atteinte à la destination des lieux ou d’esthétique. Une simple opposition de principe, idéologique, ne semble pas pouvoir être admise.
Le Syndicat des Copropriétaires peut aussi décider, pour éviter les désagréments causés par toutes sortes d’installations complémentaires, successives, peu esthétiques, encombrantes… de faire réaliser les travaux lui-même pour toutes les places de stationnement (à noter qu’il n’est ici pas prévu de desservir un "espace commun", ce qui aurait pu être une solution intermédiaire), ce qui permettrait également d’envisager, outre l’avantage de la simplicité technique, des coûts moins élevés.
Sans doute est-ce le but du décret. Mais il n’est pas sûr que cette solution obtienne l’accord de la majorité des copropriétaires, car même si les consommations seront supportées par les utilisateurs effectifs, bon nombre d’entre eux n’en auront pas l’utilité, et grinceront des dents à l’idée de devoir supporter des frais d’installation, de mise en service et d’entretien "inutilement"…
Si le Syndicat décide de réaliser les travaux, il disposera de six mois à compter de la notification du souhait d’un résident de procéder auxdits travaux à titre individuel.
Dans l’hypothèse où les travaux seraient votés dans le délai offert pour ce faire, mais ne seraient pas réalisés dans les six mois du vote des travaux en question en assemblée générale (le point de départ est-il le jour du vote en assemblée générale, ou bien le jour où la décision ne peut plus être remise en cause, c’est-à-dire deux mois après la dernière notification du procès-verbal aux copropriétaires ? – le texte ne le dit pas), le demandeur pourra alors y procéder.
Il s’agit sans doute là d’une disposition destinée à éviter que les travaux ne soient votés pour "calmer les ardeurs", mais avec un délai de réalisation différé. L’objectif est louable, mais il ne faut pas oublier que ce n’est pas le Syndicat des Copropriétaires lui-même qui va réaliser les travaux, mais bel et bien une entreprise. Dont le calendrier d’intervention devra être compatible et permettre l’exécution effective dans les six mois… Encore que vis-à-vis du demandeur la défection ou le retard de l’entreprise pourra s’analyser en un fait d’un tiers, exonérant le Syndicat de sa responsabilité et permettant sans doute à ce dernier de demander le cas échéant, par exemple, au Juge des Référés d’ordonner sous astreinte la suspension de la réalisation des travaux éventuellement engagés par le demandeur, le temps de faire choix d’une autre entreprise.
Réaliser les travaux n’est pas tout, encore faut-il entretenir. Pour une fois, ce point n’a pas été oublié. Il est ainsi d’ores et déjà prévu la conclusion d’une convention entre le Syndicat des Copropriétaires ou le copropriétaire (le texte vise expressément le propriétaire, et non pas le locataire, ce qui laisse à penser que le coût sera supporté par le propriétaire, à charge pour lui de répercuter s’il le souhaite cet élément dans les charges) d’une part et un prestataire qualifié d’autre part. Car il ne s’agit pas de remplacer en cas de défaillance une simple ampoule ou de réparer une prise électrique, mais un système plus complexe, excluant ainsi bon nombre de bricoleurs, même réguliers.
L’installation est donc à la charge du demandeur. Avec le risque, s’il s’agit d’un locataire, de "perdre son investissement" lorsque le bail prendra fin, pour une raison ou une autre. Ce qui en fera réfléchir plus d’un.
Quant à l’entretien, ce dernier est à la charge du Syndicat des Copropriétaires ou du propriétaire.
Le propriétaire, comme nous l’avons vu, pourra sans doute répercuter ledit coût sur les charges réglées par le locataire.
En revanche, cette possibilité n’est bien évidemment pas envisageable pour le Syndicat des Copropriétaires : il s’agira donc de charges communes pour tous les copropriétaires disposant d’un emplacement de stationnement, même s’ils ne se servent pas de l’installation.
Et il est à craindre que les non-utilisateurs ne soient majoritaires, tout au moins dans un premier temps, tant que le marché du véhicule automobile électrique et hybride ne se développera pas plus. Lorsque l’on connaît les déclarations des constructeurs automobiles et les calendriers de déploiement qu’ils envisagent à ce sujet, le décret peut paraître prématuré. Mais pour une fois que la législation est en avance…
Cet article a été rédigé par Me Thibaut CRASNAULT.
Il n'engage que son auteur.
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