Chemin rural – chemin d’exploitation – prescription acquisitive

Chemin rural – chemin d’exploitation – prescription acquisitive

Publié le : 09/05/2016 09 mai mai 05 2016

La qualification des chemins est parfois quelque peu hasardeuse et nécessite quelques précisions juridiques.L’article L161-1 du Code rural dispose : « Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ».

L’article L161-2 du même code : « L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale.

La destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ».

Enfin, l’article L161-3 dispose : « Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ».



L’article L162-1 du Code rural dispose quant à lui :

« Les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés. L'usage de ces chemins peut être interdit au public ».

Un chemin qui traverse des parcelles agricoles, n’est pas classé dans la voirie communale et n’apparaît dans aucun titre, peut être soit un chemin rural, soit un chemin d’exploitation.



► Un chemin d’exploitation appartient aux riverains, chacun au droit de sa propriété.

Dans la mesure où l’usage est commun à tous les intéressés, cela implique que les propriétaires riverains de ces parcelles peuvent revendiquer un passage sur toute la longueur du chemin.

De plus, un chemin d'exploitation ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires riverains et le droit d’usage ne se perd pas par non-usage trentenaire (3e Civ., 2 décembre 2014, n°13-24707 ; 3e Civ., 4 février 1998, n°96-12554).

Dans ces conditions, un chemin d’exploitation est insusceptible d’appropriation par un des riverains, ou à tout le moins, les intéressés peuvent, sans limite de temps, demander sa réouverture.


► Il existe une présomption au profit de la Commune lorsque le chemin est affecté à l’usage du public, c’est-à-dire :



  • Utilisé comme voie de passage (chasseur, entre deux voies communales…),
  • Surveillé par la Commune,
  • Entretenu par la Commune.


Il suffit qu’une seule des conditions précitée soit remplie pour que la présomption s’applique (CE, 3 décembre 2012, n°344407).



► Dès lors que le chemin n’est plus affecté à l’usage du public, il reste propriété communale mais est susceptible de prescription acquisitive trentenaire.

La prescription acquisitive des biens appartenant au domaine privé des collectivités, comme c’est le cas des chemins ruraux, a fait l’objet d’une proposition de loi mais le Gouvernement a estimé qu’attribuer à l’ensemble des biens du domaine privé le caractère d’imprescriptibilité remettrait en cause la frontière entre le régime de la domanialité publique et celui de la domanialité privée et ne limiter cette imprescriptibilité qu’aux seuls chemins ruraux, créerait une confusion en accordant à un élément du domaine privé une caractéristique propre au domaine public.

Dès lors, les chemins ruraux restent susceptibles de prescription au bout de trente ans.

L’article 2261 du Code civil dispose : « Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ».



La prescription acquisitive n’est pas acquise en cas d’absence de manifestation de possession par le propriétaire (abandon) mais par une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire, de celui qui se prévaut de l’acquisition par prescription.

La possession de celui qui revendique peut se cumuler avec celle des propriétaires successifs de ses parcelles.

Il est nécessaire de reconstituer l’historique du chemin par l’étude des titres de propriété des riverains, des attestations, des éléments cadastraux pour pouvoir envisager les chances de succès d’une action contentieuse.

L’adversaire produira également de son côté des éléments qu’il est souvent difficile d’anticiper, notamment parce que les attestations sont souvent produites de part et d’autre…

Une expertise judiciaire peut parfois être opportune.

Ainsi, la caractérisation des chemins est souvent aussi factuelle que juridique, et nécessite de bien préparer son dossier en amont.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Guiseppe Porzani - Fotolia.com

Auteur

FAGUER Marie

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