Garantie des vices cachés

La clause d'exonération de la garantie des vices cachés ne s'étend pas à la garantie d'éviction

Publié le : 12/03/2025 12 mars mars 03 2025

Au terme de l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en n’aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. La garantie protège l’acquéreur du vice qui affecte l’usage normal de la chose vendue.

Cass, 3ème civ, 13 février 2025, n°23-17.636


Il est constant que le vendeur peut toujours s’exonérer contractuellement de la garantie des vices affectant la chose vendue, l’article 1643 du code civil disposant à cet égard que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.
La jurisprudence a, pour sa part, validé depuis fort longtemps la licéité de la clause stipulant, dans l’acte authentique de vente, que l’acquéreur prendra le bien dans l’état où il se trouve au jour de la vente et n’aura aucun recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit (Cass, 3ème civ, 5 juillet 2018, n°17-18.279).

Dans tous les cas, le vendeur professionnel est réputé connaître le vice affectant le bien vendu et ne peut donc se prévaloir de l’existence d’une clause d’exonération de la garantie des vices cachés, qui n’a pas alors vocation à le protéger (Cass, 3ème civ, 15 juin 2022, n°21-21.143).

Outre la garantie des vices cachés, le vendeur est également tenu de la garantie d’éviction prévue par l’article 1626 du code civil, qui pose comme principe général que le vendeur, dont l’obligation légale est d’assurer à l’acquéreur la possession paisible de la chose vendue, est obligé à le garantir de l’éviction qu’il souffre dans la totalité ou la partie du bien vendu, ou des charges prétendues sur le bien, et non déclarées lors de la vente (Cass, 3ème civ, 6 juillet 2023, n°22-13.179, Publié au bulletin).

L’acquéreur est alors garanti au titre de la diminution de jouissance de la chose vendue du fait de la présence de servitudes non déclarées.

De la même façon que la garantie des vices cachés, la garantie d’éviction peut être aménagée contractuellement et donc exclue dans l’acte de vente en application des dispositions de l’article 1627 du code civil, avec toujours pour limite ce qui pourrait résulter du fait personnel du vendeur en application de l’article 1628 du code civil, seul le vendeur de bonne foi pouvant être protégé (Cour d’appel d’Orléans, chambre civile, 2ème section, 16 mars 1993, n°377/91).

La sanction de la présence d’une servitude non déclarée à l’acte, ni apparente, et qui est suffisamment importante pour présumer que l’acquéreur n’aurait pas procédé à l’acquisition du bien s’il en avait été instruit, est constitué par la résiliation de la vente et l’allocation de dommages et intérêts en application des dispositions de l’article 1638 du code civil.

« Qu’en statuant ainsi alors que la présence d’une canalisation non apparente, diminuant l’usage du terrain vendu et n’ayant fait l’objet d’aucune déclaration par le vendeur, constitue une charge occulte grévant le fonds, la Cour d’appel a violé l’article précité (1638 civ). » (Cass, 3ème civ, 24 septembre 2014, n°13-18.924).

Sur ce, si la servitude non déclarée et non apparente n’est pas considérée comme étant suffisamment importante pour justifier la résiliation de la vente, il n’en reste pas moins que l’acquéreur peut toujours solliciter l’allocation de dommages et intérêts en réparation de son préjudice.

Dans ce cas, l’indemnisation de l’acquéreur, pour non-déclaration d’une servitude occulte par le vendeur, est appréciée en fonction de l’existence et de l’importance objective de son préjudice, découlant de la nature de la servitude, de la fréquence de son usage et de l’atteinte portée à la jouissance de sa propriété (Cass, 3ème civ, 6 juillet 2023, n°22-13.179).

La garantie des vices cachés et la garantie d’éviction sont donc soumises à des régimes qui restent parfaitement distincts, étant entendu qu’il est de jurisprudence constante qu’une servitude non apparente ne constitue pas un vice caché et ne saurait donc relever des dispositions des articles 1641 et suivants du code civil.

L’arrêt publié qui a été rendu le 13 février 2025 (Cass, 3ème civ, 13 février 2025, n°23-17.636) ne fait que rappeler le caractère autonome de ces deux garanties, en précisant que, sans exclure la possibilité d’insérer dans l’acte de vente une clause d’exclusion de la garantie d’éviction, l’existence d’une clause d’exclusion de la garantie des vices cachés ne saurait s’étendre de facto à la garantie des servitudes occultes :
« En statuant ainsi, alors que cette clause propre à l’état du bien, n’excluait pas expressément la garantie des servitudes non apparentes non déclarées, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

Ludovic GAUVIN
Avocat Associé
ANTARIUS AVOCATS ANGERS, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
ANGERS (49)
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