Etat d'urgence sanitaire

Loi d’urgence sanitaire : focus sur les mesures !

Publié le : 24/03/2020 24 mars mars 03 2020

Le gouvernement français a établi un projet de loi d’urgence sanitaire pour faire face à l’épidémie de covid-19. Ce projet de loi a donné lieu à l’adoption d’une loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, publiée au Journal Officiel n° 0072 du 24 mars 2020.
Cette loi a pour objet d’instaurer un cadre légal et juridique aux mesures exceptionnelles restrictives de liberté mises en œuvre par l’exécutif et à leurs conséquences pratiques de nature économique, administrative ou juridictionnelle.

Domaine géographique :  

L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie « en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ».

Durée :  

L’état d’urgence sanitaire est déclaré pour une durée d’un mois par décret en conseil des ministres, sa prorogation au-delà d’un mois ne pouvant être autorisée que par la loi, après avis d’un comité de scientifiques.
 
Il peut être mis fin à l’état d’urgence sanitaire par décret en conseil des ministres avant l’expiration du délai fixé par la loi le prorogeant.

Etendue des mesures restrictives de liberté :  

Le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé :
 
1° Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret ;

2° Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ;

3° Ordonner des mesures ayant pour objet la mise en quarantaine des personnes susceptibles d'être affectées ;

4° Ordonner des mesures de placement et de maintien en isolement à leur domicile ou tout autre lieu d'hébergement adapté, des personnes affectées ;

5° Ordonner la fermeture provisoire d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l'exception des établissements fournissant des biens ou des services de première nécessité ;

6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature

7° Ordonner la réquisition de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ainsi que de toute personne nécessaire au fonctionnement de ces services ou à l'usage de ces biens. L'indemnisation de ces réquisitions est régie par le code de la défense ;

8° Prendre des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions constatées sur le marché de certains produits
 
9° En tant que de besoin, prendre toute mesure permettant la mise à la disposition des patients de médicaments appropriés pour l'éradication de la catastrophe sanitaire ;

10° En tant que de besoin, prendre par décret toute autre mesure réglementaire limitant la liberté d'entreprendre, dans la seule finalité de mettre fin à la catastrophe sanitaire
 
Les mesures prises peuvent faire l'objet de recours devant le juge administratif. 
 

Mesures économiques, financières et sociales

Le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, relevant du domaine de la loi et, le cas échéant, à les étendre et à les adapter aux collectivités territoriales afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et aux conséquences des mesures prises pour limiter cette propagation,
 
Il s’agit de prévenir et limiter la cessation d'activité des personnes physiques et morales exerçant une activité économique et des associations ainsi que ses incidences sur l'emploi, en prenant notamment toute mesure :

a) D'aide directe ou indirecte à ces personnes dont la viabilité est mise en cause, notamment par la mise en place de mesures de soutien à la trésorerie de ces personnes ainsi que d'un fonds dont le financement sera partagé avec les régions, les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution, la Nouvelle-Calédonie et toute autre collectivité territoriale ou établissement public volontaire ;

b) En matière de droit du travail, de droit de la sécurité sociale et de droit de la fonction publique ayant pour objet :

- de limiter les ruptures des contrats de travail et d'atténuer les effets de la baisse d'activité, en facilitant et en renforçant le recours à l'activité partielle pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille ;

- d'adapter les conditions et modalités d'attribution de l'indemnité complémentaire prévue en cas d’absence pour maladie ou accident ;

- de permettre à un accord d'entreprise ou de branche d'autoriser l'employeur à imposer ou à modifier les dates de prise d'une partie des congés payés dans la limite de six jours ouvrables, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités de prise de ces congés définis le code du travail et par les conventions et accords collectifs applicables dans l'entreprise ; 

- de permettre à tout employeur d'imposer ou de modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait et des jours de repos affectés sur le compte épargne temps du salarié, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d'utilisation définis au code du travail, par les conventions et accords collectifs ainsi que par le statut général de la fonction publique ;

- de permettre aux entreprises de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique et sociale de déroger aux règles d'ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical ;

- de modifier, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l'intéressement et au titre de la participation ;

- de modifier la date limite et les conditions de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat ;

c) Contrats : délais de paiement et pénalités :
 
Modifiant, dans le respect des droits réciproques, les obligations des personnes morales de droit privé exerçant une activité économique à l'égard de leurs clients et fournisseurs ainsi que des coopératives à l'égard de leurs associés-coopérateurs, notamment en termes de délais de paiement et pénalités et de nature des contreparties, en particulier en ce qui concerne les contrats de vente de voyages et de séjours ;

d) Trêve hivernale et expulsion :
 
Adaptant les dispositions de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles, notamment pour prolonger, pour l'année 2020, le délai de la trêve hivernale, et reportant la date de fin du sursis à toute mesure d'expulsion locative pour cette même année ;
 
e) Contrats publics : délais de paiement et pénalités
 
Adaptant les règles de passation, de délais de paiement, d'exécution et de résiliation, notamment celles relatives aux pénalités contractuelles, prévues par le code de la commande publique ainsi que les stipulations des contrats publics ayant un tel objet ;

f) Locaux professionnels et commerciaux : loyers et factures de fluides
 
Permettant de reporter intégralement ou d'étaler le paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels et commerciaux et de renoncer aux pénalités financières et aux suspensions, interruptions ou réductions de fournitures susceptibles d'être appliquées en cas de non-paiement de ces factures, au bénéfice des microentreprises, au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique, dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie ;
 
g) Permettant à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale de consentir des prêts et avances aux organismes gérant un régime complémentaire obligatoire de sécurité sociale ;
 
 

Mesures de nature administrative ou juridictionnelle

Le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, relevant du domaine de la loi et, le cas échéant, à les étendre et à les adapter aux collectivités territoriales Afin de faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, toute mesure :

a) Adaptant les délais et procédures applicables au dépôt et au traitement des déclarations et demandes présentées aux autorités administratives, les délais et les modalités de consultation du public ou de toute instance ou autorité, préalables à la prise d'une décision par une autorité administrative et, le cas échéant, les délais dans lesquels cette décision peut ou doit être prise ou peut naitre ainsi que les délais de réalisation par toute personne de contrôles, travaux et prescriptions de toute nature imposées par les lois et règlements, à moins que ceux-ci ne résultent d'une décision de justice ;

b) Adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d'un droit, fin d'un agrément ou d'une autorisation ou cessation d'une mesure, à l'exception des mesures privatives de liberté et des sanctions. Ces mesures sont rendues applicables à compter du 12 mars 2020 et ne peuvent excéder de plus de trois mois la fin des mesures de police administrative prises par le Gouvernement pour ralentir la propagation de l'épidémie de covid-19 ;

c) Adaptant, aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant à la conduite et au déroulement des instances, les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d'organisation du contradictoire devant les juridictions ;

d) Adaptant, aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant à ces procédures, les règles relatives au déroulement des gardes à vue, pour permettre l'intervention à distance de l'avocat et la prolongation de ces mesures pour au plus la durée légalement prévue sans présentation de la personne devant le magistrat compétent, et les règles relatives au déroulement et à la durée des détentions provisoires et des assignations à résidence sous surveillance électronique, pour permettre l'allongement des délais au cours de l'instruction et en matière d'audiencement, pour une durée proportionnée à celle de droit commun et ne pouvant excéder trois mois en matière délictuelle et six mois en appel ou en matière criminelle, et la prolongation de ces mesures au vu des seules réquisitions écrites du parquet et des observations écrites de la personne et de son avocat ;

e) Aménageant aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant ou impliquées dans ces procédures, d'une part, les règles relatives à l'exécution et l'application des peines privatives de liberté pour assouplir les modalités d'affectation des détenus dans les établissements pénitentiaires ainsi que les modalités d'exécution des fins de peine et, d'autre part, les règles relatives à l'exécution des mesures de placement et autres mesures éducatives prises en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ;

f) Simplifiant et adaptant les conditions dans lesquelles les assemblées et les organes dirigeants collégiaux des personnes morales de droit privé et autres entités se réunissent et délibèrent ainsi que les règles relatives aux assemblées générales ;

g) Simplifiant, précisant et adaptant les règles relatives à l'établissement, l'arrêté, l'audit, la revue, l'approbation et la publication des comptes et des autres documents que les personnes morales de droit privé et autres entités sont tenues de déposer ou de publier, notamment celles relatives aux délais, ainsi qu'adaptant les règles relatives à l'affectation des bénéfices et au paiement des dividendes ;

h) Adaptant les dispositions relatives à l'organisation de la Banque publique d'investissement créée par l'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement afin de renforcer sa capacité à accorder des garanties ;

i) Simplifiant et adaptant le droit applicable au fonctionnement des établissements publics et des instances collégiales administratives, y compris les organes dirigeants des autorités administratives ou publiques indépendantes, notamment les règles relatives à la tenue des réunions dématérialisées ou le recours à la visioconférence ;

j) Adaptant le droit de la copropriété des immeubles bâtis pour tenir compte, notamment pour la désignation des syndics, de l'impossibilité ou des difficultés de réunion des assemblées générales de copropriétaires ;

k) Permettant aux autorités compétentes pour la détermination des modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur, des modalités de délivrance des diplômes de l'enseignement supérieur ou des modalités de déroulement des concours ou examens d'accès à la fonction publique d'apporter à ces modalités toutes les modifications nécessaires pour garantir la continuité de leur mise en œuvre, dans le respect du principe d'égalité de traitement des candidats ;


L’ensemble de ces mesures seront à préciser dans les semaines qui viennent par le gouvernement qui légifèrera par voie d’ordonnances.
 
Les équipes du cabinet NEVEU, CHARLES & ASSSOCIES se tiennent à votre disposition pour vous accompagner dans cette période difficile et répondre à l’ensemble de vos interrogations.
 

Cet article n'engage que son auteur.
 

Auteur

Julien CHAMARRE
Avocat Associé
NEVEU, CHARLES & ASSOCIES
NICE (06)
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