Souscription à un prêt et assurance

Publié le : 15/12/2008 15 décembre déc. 12 2008

La souscription d’un prêt, à la consommation ou immobilier, est souvent accompagnée d’une assurance complémentaire au crédit censée couvrir les risques de décès, d’incapacité de travail, et parfois de chômage.

Le refus de l’assureur de payer en lieu et place du souscripteur les échéances du prêtFréquemment, la banque réserve son accord à la délivrance du prêt, à la souscription d’une assurance de ce type, proposée auprès d’un assureur de son choix, avec lequel elle a négocié un contrat dit de groupe. Il arrive même, parfois, que l’établissement bancaire soit mandaté par l’assureur pour gérer l’exécution du contrat d’assurance et la prise en charge en cas de sinistre. Toutefois, l’intervention de l’établissement bancaire ne fait pas disparaître les litiges relatifs au refus de l’assureur de payer en lieu et place du souscripteur les échéances du prêt. Deux types de difficultés se rencontrent fréquemment, d’une part, un refus de prise en charge en raison de déclarations prétendument inexactes à l’occasion des réponses données au questionnaire de santé soumis par l’assureur, d’autre part un refus de prise en charge lié à l’invalidité qui affecte l’assuré. 1/ Les réponses au questionnaire de santé Il est constant que le souscripteur d’une assurance complémentaire à un prêt doit répondre de manière sincère aux questions médicales qui lui sont posées. A défaut, en application de l’article L 113-8 du Code des Assurances, le contrat d’assurance est nul, et ceci même lorsque la réponse inexacte au questionnaire est sans rapport avec l’affection en raison de laquelle il est sollicité la prise en charge par l’assureur du contrat de crédit. Il suffit que l’assuré ait fait une fausse déclaration et que celle-ci ait changé l’objet du risque ou en ait diminué l’opinion pour l’assureur. Les questionnaires remis par l’assureur sont souvent peu clairs. Dans ces circonstances, si une réponse inexacte a été apportée par l’assuré quant à sa santé, il est possible de contester le refus de prise en charge de l’assurance au motif du caractère ambigu de la question à laquelle il a été répondu. Celle-ci doit alors s’interpréter de manière favorable au consommateur. Dans un arrêt du 13 juillet 2006, la première Chambre Civile de la Cour de Cassation a cassé une décision ayant considéré qu’une clause rédigée dans les termes suivants,« Si le décès ou l’invalidité permanente et totale de la personne assurée résulte d’un accident et s’il survient immédiatement dans les douze mois suivants le jour de l’accident… », était grammaticalement correcte et ne présentait pas un caractère ambigu justifiant d’une interprétation favorable au consommateur ou au professionnel au motifs « qu’en statuant ainsi alors que la clause jugée était ambigüe et qu’elle devait être interprétée dans le sens le plus favorable à l’assuré, ce qui excluait l’application du délai de 12 mois à l’invalidité la Cour d’Appel a violé le texte susvisé. » Dans une autre affaire, la Cour d’Appel de Douai dans une décision du 25 mai 2008 (n° RG 07/4357) a eu à se prononcer sur la validité d’une clause aux termes de laquelle l’assuré déclarait : « ne pas avoir séjourné plus de 15 jours dans un établissement hospitalier au cours des dix dernières années et/ou ne pas avoir subi d’intervention chirurgicale… ». L’assurée avait subi une intervention chirurgicale au cours des 10 dernières années mais n’avait pas séjourné plus de 15 jours dans un établissement hospitalier lors de cette même période. L’assureur refusait sa garantie au motif que l’emploi de deux conjonctions de coordination (et/ou) devait s’entendre comme cumulatives et son assuré avait fait une fausse déclaration en n’indiquant pas avoir subi une intervention chirurgicale au cours des 10 dernières années. La Cour d’Appel de Douai a considéré, au contraire, que l’assuré soutenait à juste titre que la rédaction ambigüe de la clause qui utilisait à la fois deux conjonctions de coordination (et/ou) pouvait l’amener à considérer qu’il n’avait pas à déclarer l’intervention chirurgicale au motif qu’il n’avait pas séjourné plus de 15 jours dans un établissement hospitalier pendant la même période. Cette décision apparaît particulièrement intéressante en ce que de nombreux contrats d’assurance complémentaires à un crédit emploient ces deux conjonctions de coordination et/ou, ce qui grammaticalement n’a aucun sens et, en pratique, permet à l’assureur de refuser la prise en charge dès lors que l’une des conditions posées n’est pas remplie, condition que son assuré a pu ne pas déclarer en toute bonne foi… 2/ Les conditions de l’incapacité L’intérêt principal de l’assurance complémentaire au crédit réside dans la faculté donnée à l’emprunteur de pouvoir surmonter une éventuelle perte de revenus consécutive à l’incapacité dans laquelle il se trouverait de poursuivre son activité professionnelle, de manière temporaire ou définitive, en faisant payer les sommes consacrées au remboursement d’un prêt, tirées de cette activité professionnelle, par l’assureur. Toutefois, dans de nombreux contrats, la garantie offerte par l’assureur ne consiste pas à prendre en charge les échéances du prêt lorsque le souscripteur est dans l’incapacité de poursuivre son activité professionnelle mais se limite à prendre les échéances dudit prêt en cas d’invalidité absolue. Cette garantie suppose, alors, non seulement que le souscripteur soit dans l’incapacité de poursuivre son activité professionnelle mais qu’il soit dans l’incapacité d’exercer une activité quelle qu’elle soit, professionnelle ou non. La rédaction de ces clauses amenait le Président JOUHAUD dans le rapport annuel de la Cour de Cassation de 1985 (page 9) à considérer qu’aux termes de ces clauses : « l’assurance n’existe qu’avant l’accident. » Néanmoins, la Cour de Cassation se refuse à les censurer, laissant aux juges du fond l’appréciation de la validité de ce type de clause. Or, de nombreuses Cour d’Appel refusent de les considérer comme abusives. Toutefois, si le souscripteur du contrat d’assurance complémentaire à un crédit ne peut avoir la certitude d’obtenir de l’assurance la prise en charge des échéances de son prêt au motif de son incapacité à poursuivre son activité professionnelle, il peut aux termes d’une jurisprudence aujourd’hui constante de la Cour de Cassation engager la responsabilité de l’établissement de crédit pour manquement à son obligation de conseil. La responsabilité de l’établissement bancaire a ainsi été retenue dans une décision du 2 octobre 2008 (Civ. 1ère 2 oct. 2008, jurisdata n°2008704180) sur une clause proposée dans un contrat de la CNP extrêmement limitative, la Cour de Cassation cassant la décision d’appel au motif que le Juge du fond n’avait pas « rechercher si la banque avait éclairé ML sur l’adéquation du risque couvert par le contrat avec sa situation personnelle d’emprunteur. » Le principe de la responsabilité de la banque pour défaut de conseil apparaît bien établi. Le manquement sera réparé par la perte d’une chance d’avoir été couvert par une assurance, l’évaluation de cette perte de chance étant laissée aux juges du fond (pour ex. Civ. 1ère 18 sept. 2008, jurisdata n°2008045002).
Il ressort des développements précédents que le souscripteur d’une assurance invalidité décès qui se voit opposer un refus de garantie aura fréquemment intérêt à le contester soit auprès de l’assureur en cas de clause ambigüe, soit à l’encontre de l’établissement de crédit en cas de contrat inadapté à ses besoins.

Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

VILLESECHE Jean-Marc
Avocat Associé
HAINAUTJURIS
AVESNES SUR HELPE (59)
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