Responsabilité banque et escroquerie

Responsabilité de la banque face à une escroquerie

Publié le : 28/03/2025 28 mars mars 03 2025

Quelle est la responsabilité des banques face aux différentes escroqueries dont leurs clients peuvent être victime ?
Cette question ne cesse de se poser en ce moment face à la récurrence des escroqueries, type phishing (technique de fraude en ligne où des messages, emails ou sms, sont envoyés aux victimes afin qu’elles communiquent leurs données bancaires, en se faisant passer pour une entité de confiance) ou spoofing (l’escroc appelle la victime en se faisant passer pour une source officielle ou pour un employé du service des fraudes de la banque de sa victime afin de lui faire valider un certain nombres d’opérations frauduleuses destinées à lui détourner de l’argent).

Il convient de rappeler que la Jurisprudence a posé un devoir général de vigilance et de vérification incombant aux prestataires de services de paiement (voir par exemple Cour de cassation, chambre commerciale, 9 juillet 1996, pourvoi n°94-17119).

Ce devoir de vigilance était fondé sur la responsabilité contractuelle de droit commun résultant de l’ancien article 1147 du Code civil.

L'ordonnance n°2009-866 du 15 juillet 2009, transposant la directive 2007/64/CE du 13 novembre 2007, est venue poser un régime de responsabilité spécial en matière d’instruments de paiement que l’on retrouve aux articles L133-21 et suivants du Code monétaire et financier.

Ainsi, l’article L133-21 alinéas 1 et 2 du Code monétaire et financier dispose que « Un ordre de paiement exécuté conformément à l'identifiant unique fourni par l'utilisateur du service de paiement est réputé dûment exécuté pour ce qui concerne le bénéficiaire désigné par l'identifiant unique.
Si l'identifiant unique fourni par l'utilisateur du service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n'est pas responsable de la mauvaise exécution ou de la non-exécution de l'opération de paiement ».

Par une décision importante du 15 janvier 2025, la Chambre commerciale de la Cour de cassation (pourvoi n°23-15437) est tout d’abord venue rappeler que le régime de responsabilité issu de cet article est exclusif de tout autre régime de responsabilité et notamment celui de la responsabilité contractuelle.

En outre, la Cour de cassation rappelle par cet arrêt que si l’identifiant unique fourni par l’utilisateur de service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n’est pas responsable de la mauvaise exécution.

Autrement dit, il n’appartient pas au banquier de contrôler l’absence d’anomalie apparente affectant l’ordre de paiement.

Ainsi, en cas d’escroquerie, il appartiendra à la victime de prouver qu’il existait une anomalie apparente engageant la responsabilité du banquier. 

Ces propos restent toutefois à nuancer.

En effet, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 29 mai 2019 (pourvoi n°18-10147) a précisé qu’il incombe à l’établissement bancaire, dont la responsabilité est recherchée, de rapporter la preuve que l'utilisateur, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, a agi frauduleusement ou n'a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations ; que cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l'instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisés.

Enfin, la Jurisprudence a, concernant le spoofing, précisé qu’une victime n’avait pas fait preuve de négligence dans une telle arnaque (celle-ci ayant diminué sa vigilance compte tenu des connaissances par l’auteur des faits des données bancaires et de l’utilisation du numéro de téléphone de la banque) et qu’elle avait agi en se croyant en toute sécurité (CA VERSAILLES, 13ème chambre, 28 mars 2023, n°21/07299 et CA PARIS, Pôle 5 – Chambre 6, 7 février 2024, n°21/17709).

Cette jurisprudence a été récemment confirmée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 23 octobre 2024 (pourvoi n°23-16267).

En conclusion, la responsabilité de la banque peut donc être engagée en cas d’escroquerie dès lors que la victime utilisant les instruments de paiement n’a pas fait preuve d’une négligence grave ou n’a pas agi intentionnellement.

A toutes fins utiles, il est intéressant de souligner qu’avant d’engager une action en justice, il existe la possibilité de recourir à une médiation, notamment avec le médiateur de la banque.


Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

Emmanuel LEBLANC
Avocat Associé
HMS JURIS
CORBEIL ESSONNES (91)
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