Nature des recettes électorales devant être intégrées dans le compte de campagne

Nature des recettes électorales devant être intégrées dans le compte de campagne

Publié le : 22/01/2014 22 janvier janv. 01 2014

Chaque candidat tête de liste soumis au plafonnement et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés, est tenu d'établir un compte de campagne durant l’année précédant le 1er jour du mois de l’élection.

Le contrôle du financement des campagnes électorales est exercé par la Commission Nationale des Comptes de Campagne pour toutes les élections à l’exception de l'élection des conseillers généraux dans les cantons de moins de 9 000 habitants et de celle des conseillers municipaux dans les communes de moins de 9 000 habitants pour lesquelles aucun plafonnement des dépenses électorales n’est imposé (article L. 52-4 dernier alinéa du code électoral).

Ainsi, aux termes de l’article L. 52-12 du code électoral, chaque candidat tête de liste soumis au plafonnement et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés, est tenu d'établir un compte de campagne durant l’année précédant le 1er jour du mois de l’élection.

Ce compte doit retracer, selon leur origine, l'ensemble des recettes électorales perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle (affiches, bulletins de vote et circulaires), par lui-même ou pour son compte.

Ainsi, s’agissant des recettes, doivent être intégrés dans le compte de campagne tous les dons et avantages en nature directs ou indirects, les contributions des groupements politiques, les apports personnels des candidats et les produits issus d’opérations commerciales telles que les ventes de tee-shirts à l’effigie du candidat par exemple.

Est-ce que le fait pour un employeur de placer à mi-temps son salarié pour lui permettre de réaliser sa campagne électorale en tant que tête de liste aux élections locales, constitue un avantage devant être intégré dans le compte de campagne électorale de la liste du parti ?



Deux situations sont à distinguer :

  • 1) L’employeur place son salarié candidat à mi-temps en privant celui-ci de la rémunération correspondante (congés légaux avec solde ou congés sans solde)
Dans cette hypothèse, se pose la question de la qualification de l’avantage consenti.

La Commission Nationale des Comptes de campagne définit le concours en nature comme étant « toutes les prestations dont le candidat a pu bénéficier, qui n'ont donné lieu à aucune facture, aucun mouvement de fond ou qui n'ont fait l'objet que d'une évaluation. » (Notice d’information pratique pour remplir le compte de campagne, édition 2014).

En somme, les avantages en nature correspondent à l’utilisation par le candidat de ses biens personnels pour sa campagne, aux concours apportés par un parti dans le cadre de ses activités normales de soutien au candidat, et plus généralement à tout concours gracieux apporté par une personne physique.

Constitue par un exemple un avantage en nature devant être intégré dans le compte de campagne, l’utilisation pour les besoins de la campagne d’une candidate élue conseiller général de certains personnels municipaux (CE, 10 juin 1996, n°162476).

Constitue également un avantage en nature l’utilisation de son véhicule et de son téléphone personnels (CAA de Paris, 11 mars 2003, Lepage, n° 02PA02621).

Ainsi, l’avantage consenti par l’employeur pourrait être qualifié d’avantage en nature qui consisterait à donner à son employé du temps libre pour mener sa campagne.

Néanmoins, cet avantage doit-il pour autant être intégré dans le compte de campagne ?

La Commission considère que les concours en nature doivent être inscrits aux comptes de campagne en dépenses et en recettes pour le contrôle du respect du plafond des dépenses (Notice d’information pratique précitée). Le candidat doit donc estimer ces avantages en nature et les reporter sur le formulaire de déclaration de son compte de campagne.

Néanmoins, les avantages en nature consentis sont également généralement des dépenses électorales.

Tel est notamment le cas de la publication d’un ouvrage par le candidat, dont le coût estimé doit être réintégré dans le compte de campagne (Voir à ce sujet la décision de la Commission du 19 décembre 2012 relative au compte de campagne de M. François BAYROU, candidat à l'élection du Président de la République des 22 avril et 6 mai 2012).

Cette circonstance révèle tout l’intérêt pour la commission d’en exiger l’intégration dans le compte de campagne dans le cadre du contrôle du respect des règles de plafonnement.

Or, le temps libre accordé par un employeur à son employé candidat n’est pas en soi susceptible d’être par ailleurs qualifié de dépense électorale.

En l’absence de jurisprudence fournie sur cette question particulière, l’on peut raisonner par analogie avec le temps libre consacré bénévolement par des militants à la campagne électorale de candidats qu’ils soutiennent.

Ainsi, la Commission estime que le travail bénévole des militants, qui constitue indubitablement un avantage en nature, n’a pas à faire l’objet d’une estimation (Notice précitée).

En conséquence, je pense que l’on peut tout à fait estimer qu’une telle situation n’a pas à donner lieu à imputation en avantage en nature dans le compte de campagne.

Cependant, dans l’hypothèse de l’octroi d’un congé sans solde, peut-on considérer que la perte de rémunération engendrée constitue une dépense électorale ?

Je pense que la réponse est négative, d’autant plus qu’une telle dépense ne pourrait pas être justifiée, comme il se doit, par une facture.

  • 2) L’employeur place son salarié à mi-temps tout en conservant sa rémunération à temps plein (mi-temps de fait avec maintien de la rémunération complète)
Dans ce cas, l’avantage consenti est susceptible d’être considéré comme un don financier. Mais je pense simplement que son intégration dans le compte de campagne dépend finalement de l’objectif poursuivi.

Ainsi, si l’avantage a pour objet de financer ladite campagne, alors il devra naturellement impérativement être intégré dans le compte de campagne dès lors qu’il aura vocation à financer la campagne.

Il conviendra alors d’être vigilant sur le respect de la règlementation relative au financement de la campagne, et notamment celles issues de l’article L. 52-8 du code électoral (le plafonnement des dons consentis par les personnes physiques et l’interdiction des dons consentis par les personnes morales, de droit public ou de droit privé).

En revanche, si l’avantage financier crée n’a pas pour but de contribuer au financement de la campagne mais seulement celui de laisser au candidat du temps libre, alors on peut considérer que l’avantage consenti se limite à un avantage en nature qui consiste uniquement à lui laisser du temps libre pour mener sa campagne.

Finalement, que l’on soit dans l’une ou l’autre situation, l’avantage en nature consenti ne doit pas, à mon sens, être intégré dans le compte de campagne.

En tout état de cause, l’omission d’une recette électorale dans le compte de campagne d’un candidat n’entraine pas nécessairement le rejet du compte et la perte du droit au remboursement forfaitaire, l’inéligibilité du candidat et l’annulation de l’élection.

En cas d’omission d’une recette ou d’une dépense, celle-ci sera, selon son ampleur, réintégrée dans le compte de campagne, ce qui, en cas de dépassement du plafond des dépenses ou des dons, entrainera le rejet des comptes. En conséquence, le candidat sera privé de son droit au remboursement des dépenses de campagne et le juge de l’élection sera saisi.

Celui-ci pourra prononcer l’inéligibilité du candidat, et par voie de conséquence, l’annulation de son élection. Néanmoins, il est constant que celle-ci ne sera susceptible d’être prononcée que si le cas du candidat relève d’une volonté de fraude ou d'un manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales (Conseil d’Etat, 13 juin 2012, n°355270).





Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Roman Sigaev - Fotolia.com

Auteur

VERGER Julie

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