Concurrence entre agences immobilières et absence d'exclusivité

Concurrence entre agences immobilières et absence d'exclusivité

Publié le : 01/06/2016 01 juin juin 06 2016

La Cour de Cassation, dans son arrêt du 6 avril 2016 n°15-14631, confirme l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Rouen qui avait jugé de l’absence de lien contractuel entre l’acquéreur et l’agence.Un couple vendeur signe un mandat exclusif de vente avec une agence immobilière visant à la vente d’un bien immobilier au prix de 483.000 Euros, frais d’agence inclus à hauteur de 23.000 Euros.

Malgré l’expiration de la période d’exclusivité, l’agence immobilière fait visiter à un couple l’immeuble, qui propose une offre d’achat de 460.000 Euros, frais d’agence inclus, soit une offre net vendeur de 437.000 Euros, la commission restant à 23.000 Euros.



Une offre plus élevée étant faite au couple vendeur, le couple acquéreur précité formule une nouvelle offre à hauteur de 475.000 Euros, par le biais d’une autre agence immobilière, qui n’a pas fait visiter le bien, et ce le lendemain de l’offre proposée par la première agence.

L’offre de 475.000 Euros est retenue par les vendeurs, et la vente se réalise.



La première agence immobilière assigne alors les acquéreurs et les vendeurs en indemnisation de son préjudice, à savoir la perte de sa commission.

L’agence évincée soutient en effet que les acquéreurs ayant visité le bien par son biais devaient lui soumettre leur offre en priorité, et que le fait de formuler leur offre par l’intermédiaire d’une autre agence ne leur ayant pas fait visiter le bien constituait un comportement déloyal indemnisable.

La Cour d’Appel devait juger qu’aucune faute n’était imputable à l’acquéreur, infirmant par là le Jugement de première instance, et l’agence formait alors un pourvoi en Cassation.

Il ressort de l’arrêt que l’agence demanderesse s’est désisté de son pourvoi à l’encontre des vendeurs, ce qui paraît parfaitement logique, puisque, la période d’exclusivité étant expirée, ceux-ci n’avaient pas à se préoccuper de l’agence qui leur soumettait une offre et restaient uniquement intéressés par l’offre la plus élevée à leur profit.



Il restait à vider le pourvoi à l’encontre des acquéreurs, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l’article 382 du Code Civil.

Sur les moyens soutenus par l’agence vis-à-vis des acquéreurs, celle-ci considérait que le couple avait commis une faute, constituée par un comportement déloyal, en formulant une offre le lendemain même de celle faite à l’agence, et par le biais d’une autre agence.

Le fond du problème est évidemment financier, puisque l’agence évincée était restée sur une commission à hauteur de 23.000 Euros, tandis que la seconde agence se contentait d’une commission de 15.000 Euros.

Ainsi, les acquéreurs pouvaient proposer, avec la seconde, une offre net vendeur à 460.000 euros, tandis qu’avec la première, l’offre net vendeur n’était plus que de 437.000 Euros. Il est évident que les vendeurs ne pouvaient que choisir l’offre la plus élevée, ce qu’ils ont fait.



La Cour de Cassation confirme la position de la Cour d’Appel, précisant que l’acquéreur n’étant pas lié contractuellement avec l’agent immobilier par l’intermédiaire duquel il a visité le bien, il ne commet aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité délictuelle dès lors qu’il adresse une nouvelle offre aux vendeurs par le biais d’une autre agence immobilière.



Il est intéressant de comparer le traitement offert à l’acquéreur dans cet arrêt à celui que la Cour avait réservé à l’agence immobilière dans celui rendu le 14 janvier 2016 (et commenté par ailleurs ici).

Dans l’arrêt présent, la Cour énonce clairement l’absence de lien entre l’acquéreur et l’agence, et ce, au détriment de l’agence.

Dans l’arrêt du 14 janvier, la Cour sanctionne l’agence immobilière pour un défaut de conseil à l’égard de l’acquéreur, considérant que celle-ci est tenu tout autant envers le vendeur, avec qui elle est liée contractuellement, qu’envers toute partie à l’opération conclue par son entremise, quand bien même elle ne serait pas partie au contrat de mandat signé.



Cette succession d’arrêts place ainsi les agences immobilières sous le feu des projecteurs de l’actualité jurisprudentielle, mais certainement pas à leur avantage.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Daiga - Fotolia.com

Auteur

BROGINI Benoît

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