Le Juge et la mise en œuvre de la clause résolutoire en matière de baux commerciaux

Le Juge et la mise en œuvre de la clause résolutoire en matière de baux commerciaux

Publié le : 08/11/2017 08 novembre nov. 11 2017

La cour de cassation vient une nouvelle fois rappeler par son arrêt du 05 octobre 2017 ( n°15-25018) que le Juge saisi en constatation du jeu de la clause résolutoire n'a aucun pouvoir d'appréciation, il ne peut juger de "la gravité du manquement contractuel" et doit simplement constater que le manquement reproché n'a pas cessé dans le délai d'un mois prévu au commandement.

Dès lors que les conditions d'application sont réunies (existence d'une violation d'une stipulation expresse du bail, délivrance d'un commandement  et persistance de la violation pendant plus d'un mois après la délivrance du commandement) et qu'aucune demande de suspension des effets n'a été formulée, la clause résolutoire s'impose au Juge ( Civ. 3ème 16 juillet 1975, n°74-13221, Bull civ. III, n°253) et il devra prononcer l'expulsion du locataire.

Le juge ne doit pas rechercher si la sanction demandée est proportionnée à la gravité du manquement ni se donner le droit de limiter les effets de la clause à certains manquements ( tels que par exemple ceux liés au paiement du loyer et des charges).

Il ne pourra pas être tenu compte de l'éventuelle bonne foi du locataire ni même du fait que le manquement reproché ne fait subir aucun préjudice au bailleur. 

Voilà une sanction extrêmement sévère qui ne laisse que peu d'alternative au preneur, sauf à démontrer au Juge saisi en constatation de la clause résolutoire que le bailleur a mis en œuvre le jeu de la clause résolutoire de mauvaise foi.

Le preneur n'a d'autre choix que de solliciter une suspension des effets de la clause. Dans cette hypothèse, le juge devra constater l'acquisition de la clause résolutoire  mais en suspendre les effets pendant un délai qu'il fixe au sein de sa décision. Si le preneur s'exécute pendant ce délai de grâce la clause sera réputée ne pas avoir joué. Cette faculté est expressément prévue par l'article  L. 145-41 alinéa 2 du Code de commerce.

En l'espèce, il s'agissait effectivement d'un manquement à relativiser "au regard du type d'occupation (panneaux publicitaires), du caractère dérisoire de la contrepartie (400,00 € par an) et des trois attestations (dont deux émanant de personnes n'ayant aucun lien avec lui) que [...le preneur...] verse aux débats témoignant de l'existence de ces panneaux publicitaires depuis au moins 1976" selon la motivation de la Cour d'appel de St Denis. Pourtant, cela n'a aucune influence quant au  jeu de la clause résolutoire.

La stratégie de défense que le preneur a intérêt à mettre en œuvre doit donc s'adapter à la sévérité de la sanction. S'il est en mesure de régulariser la situation dans le délai d'un mois, il doit s'en réserver la preuve de façon notamment à donner date certaine à sa régularisation. Si au contraire, le manquement est tel qu'il ne peut régulariser la situation dans le délai d'un mois, il a intérêt à saisir lui même le juge afin de se voir accorder une suspension des effets de la clause, l'initiative de la procédure lui permettant a minima de démontrer sa bonne foi. 


Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo: © kotoyamagam - Fotolia.com
 

Auteur

ALCALDE Céline
Avocate Associée
DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE , DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE
MONTPELLIER (30)
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