Avocats : crise d’attractivité, de taille, de structure : quels remèdes ?

Avocats : crise d’attractivité, de taille, de structure : quels remèdes ?

Publié le : 21/12/2018 21 décembre déc. 12 2018

Caroline NEVEUX, vous êtes consultante en finance et stratégie pour les Cabinets d’Avocats. 
Vous animerez au prochain Congrès un atelier sur la rémunération des associés. 

Q1 / En quoi le mode de répartition du revenu entre Associés est-il déterminant pour l’avenir du Cabinet (ou l’Etude) ? 

Le mode de répartition du résultat entre associés se doit d’être la traduction d’une politique stratégique au service de la pérennité et de la croissance du cabinet. En d’autres termes, il faut qu’il soit le garant du respect de valeurs communes, de partage et de solidarité, tout en préservant un caractère motivant et différenciant, prenant en compte les niveaux divergents de performance et de surperformance. Le mode de répartition devra, enfin, offrir une souplesse permettant de protéger les choix auxquels les associés peuvent être confrontés dans un parcours libéral.

Q2 / Avez-vous un bon conseil à fournir à des Associés qui n’ont pas la même activité ?   

Dans cette configuration, il m’apparaît tout d’abord indispensable que chaque associé sache promouvoir, avec une certaine dextérité, la prestation de ses associés.

Par ailleurs, le « parcours client » et la façon dont le client lui-même sera suivi, traité et « partagé » en interne constitue une priorité à définir avec précision dans ce cas.  En outre, il est important de disposer de bonnes données statistiques sur la façon dont les clients sont « consommées », tant en droit que sur les aspects « marché », de sorte à faire des choix stratégiques économiquement censés et dont le retour sur investissement sera palpable.

Enfin, un projet commun de développement de cabinet et une bonne communication interne et externe demeurent indispensables dans cette configuration. 

Q3 / Quel est votre sentiment sur les tendances de fond au sein des Cabinets d’Avocats que vous accompagnez actuellement ? 

La première constatation n’est pas une tendance mais une véritable remise en cause du métier d’avocat (réformes lois Macron et ouverture du marché, réformes en cours des métiers du droit, réforme de la justice, etc.).
 
Ensuite (et à cause) de ce qui précède :
 
  • Les titulaires du CAPA étant de plus en plus chassés par les directions juridiques, le métier d’avocat n’attire plus. Ceci se traduit par une difficulté généralisée pour recruter mais aussi retenir les talents ! Les Cabinets et Etudes connaissent des problèmes de management et peuvent sous-estimer l’importance d’un véritable projet d’entreprise à proposer aux recrues.
  • Les Directions juridiques traitent de plus en plus en interne.
  • Les structures de province semblent mieux armées car plus solides financièrement.
  • Les Cabinets parisiens sont mal structurés (associations, AARPI ou SCP IR), et incapables de capitaliser la valeur ajoutée : il n’y a souvent pas de projet commun mais une simple juxtaposition d’individualités.
  • Le critère de recrutement des nouveaux associés de cabinets parisiens reste le montant de Chiffre d’Affaires. Ces structures ne sont donc pas prêtes à investir dans de nouvelles pratiques ou pratiques émergeantes en faisant venir de jeunes associés avec un faible Chiffre d’Affaires.  
  • Les Cabinets parisiens full service de taille intermédiaire (4 à 15 associés) se retrouvent en difficulté car :
    • Leur offre n’est pas suffisamment différenciée tandis que la concurrence est forte,
    • Ils connaissent une baisse de la facturation mais aussi des marges (tarifs, panier moyen, récurrence, forfait) alors que leurs charges (collaborateurs, salariés, locaux…) se maintiennent voire augmentent !
    • Ils subissent la concurrence de cabinets en régions.
  • On voit se développer -surtout à PARIS, des cabinets de niches (spécialités ou sectorielles) hyper spécialisés de 1 à 3 associés et quelques collaborateurs.
  • Il existe une accélération des regroupements d’avocats et des recherches d’associés. Les Professionnels ne veulent plus exercer seuls car ce statut limite leur visibilité et surtout ne répond plus aux demandes du marché. En revanche, ils manquent souvent de véritables projets entrepreneuriaux.
  • Ces cabinets ont des difficultés à décliner et présenter leurs domaines de pratique en véritables offres : on voit beaucoup de réflexions et d’interrogations mais finalement peu de passages à l’action. Par ailleurs, ils ne parviennent que très difficilement à se mettre « en mode projet ».
  • Enfin, on assiste naturellement à beaucoup de réflexions et de questionnements sur l’interprofessionnalité (surtout avec les expert comptables), mais l’on comptabilise peu de concrétisations. En réalité, il existe de grandes différences culturelles, et de valeurs, entre avocats et expert comptables. Ainsi, les projets se font souvent à l’initiative de ces derniers, mieux structurés et en mieux capitalisés.

La suite… Au Congrès EUROJURIS 2019 !
 

Propos recueillis par Marjolaine RATIER, Déléguée Générale EUROJURIS France 
 

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