La réforme du temps de travail, par Me Vanhoutte

Publié le : 02/10/2008 02 octobre oct. 10 2008

La loi du 20 août 2008 « portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail » modifie les règles applicables en matière de temps de travail, sujet auquel nous nous limiterons.

Heures supplémentaires, forfait en jours ou en heures, congés payés et CETDe façon générale, cette nouvelle loi clarifie les dispositions du code du travail concernant le temps de travail. Les modifications tendent d’une part à faciliter la gestion du temps de travail pour les employeurs et, d’autre part, à permettre aux salariés de travailler plus.

Les nouveautés législatives principales concernent les points suivants:

I. Le contingent annuel d’heures supplémentaires
II. L’information relative aux heures supplémentaires
III. Le repos compensateur obligatoire
IV. Les changements en matière de conventions de forfait
IV.1 – Champ d’application des conventions de forfait
a. Les non - cadres éligibles aux forfaits en jours ou en heures
b. Les cadres éligibles aux forfaits en jours ou en heures
IV.2 – Forfait en jours : plafond et entretien annuels
V. Le droit à congés payés dès dix jours de travail
VI. La répartition et l’aménagement du temps de travail
VII. Les règles relatives au Compte Epargne Temps (CET)


I. Le contingent annuel d’heures supplémentaires

Comme auparavant, un accord collectif peut fixer le contingent annuel d’heures supplémentaires . A défaut d’accord, un décret détermine le contingent annuel d’heures supplémentaires ; ce contingent réglementaire est actuellement de 220 heures, ou de 130 heures en cas de modulation .

Les accords collectifs conclus antérieurement ne sont pas affectés par la nouvelle loi.

Afin de faciliter la conclusion d’accords collectifs, concernant notamment le contingent annuel d’heures supplémentaires, les règles de négociation collective ont été modifiées.

Ainsi, l’employeur pourra désormais conclure un accord d’entreprise avec un syndicat ayant obtenu 30% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections dans l’entreprise .

Toutefois, le syndicat ayant obtenu 50 % des voix lors des mêmes élections pourra s’opposer à l’accord .


II. L’information relative aux heures supplémentaires

Dès lors que des heures supplémentaires sont effectuées par les salariés, l’employeur devra en informer le comité d’entreprise ou à défaut les délégués du personnel. En cas de dépassement du contingent annuel, l’employeur devra recueillir l’avis des mêmes institutions représentatives du personnel .

Il n’est en tout cas plus nécessaire d’informer l’inspection du travail des heures supplémentaires effectuées .


III. Le repos compensateur obligatoire

Jusqu’à présent, le salarié bénéficiait d’un repos compensateur dès qu’il travaillait plus de 41 heures par semaine, dans une entreprise de plus de 20 salariés, ou s’il travaillait au-delà du contingent annuel, dans une entreprise de 20 salariés au plus.

Dorénavant, le seuil de 41 heures hebdomadaires disparaît et seul le dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires génère un droit à repos compensateur obligatoire pour l’ensemble des salariés .

Le projet de loi confiait aux accords collectifs le soin de déterminer la durée du repos compensateur obligatoire mais le Conseil constitutionnel s’y est opposé en estimant que cela ressort exclusivement de la compétence législative .

A défaut d’accord collectif possible, c’est donc la loi seule qui fixe la durée du repos compensateur obligatoire soit, actuellement, 50% ou 100% des heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent, selon que l’entreprise emploie 20 ou plus de 20 salariés .

La loi ne modifie pas la possibilité de prévoir par accord collectif le remplacement du paiement des heures supplémentaires et des majorations par un repos compensateur équivalent .


IV. Les changements en matière de conventions de forfait

Les dispositions relatives aux conventions de forfait pour les cadres et non - cadres sont entièrement refondues, tant sur le fond que sur la forme .

Néanmoins, l’accord écrit du salarié demeure une condition sine qua non à l’application d’un forfait.

Nous exposerons dans un premier temps les catégories de salariés désormais éligibles aux conventions de forfait. Dans un second temps, nous étudierons les nouvelles règles fixant le nombre maximal de jours travaillés par le salarié sous convention de forfait en jours.


IV.1 – Champ d’application des conventions de forfait

a. Les non - cadres éligibles aux forfaits en jours ou en heures

Le forfait en heures est ouvert au salarié non - cadre sans exiger qu’il soit itinérant, comme prévu antérieurement . Il suffit que le salarié dispose d’une réelle autonomie dans l’organisation de son emploi du temps . Ce forfait reste de 1607 heures maximum.

Concernant les forfaits en jours, les salariés non - cadres pourront, comme avant la loi, accepter une convention de forfait en jour si leur temps de travail ne peut être prédéterminé et si ils disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps .

b. Les cadres éligibles aux forfaits en jours ou en heures

Les conditions d’éligibilité des cadres au forfait en jours et au forfait en heures ont évolué.

Jusqu'à maintenant, les cadres dont les fonctions ne les conduisaient pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de leur service pouvaient travailler sous convention individuelle de forfait en jours ou en heures .

Dorénavant, pour conclure un forfait jours, les cadres devront être non seulement insoumis à l’horaire collectif mais aussi autonomes dans l’organisation de leur emploi du temps . Cela n’était pas exigé explicitement auparavant .

Le changement majeur concerne le nombre maximum de jours travaillés dans le cadre d’une convention de forfaits en jours.


IV.2 – Forfait en jours : plafond et entretien annuels

La loi réaffirme le plafond annuel légal de 218 jours de travail pour les conventions de forfait en jours . Les accords collectifs ne peuvent donc fixer un nombre annuel en jours travaillés qui serait supérieur à 218 jours.

Toutefois, le salarié peut accepter de travailler jusqu’à 235 jours.

Seul un accord collectif pourra autoriser le salarié à renoncer à des jours de congés pour travailler plus de 235 jours par an, tout en restant dans la limite annuelle fixée par l’accord.

En théorie, l’accord collectif peut autoriser jusque 282 jours de travail par an, soit le maximum légal possible : 365 jours par an minorés des 52 jours de repos hebdomadaires, minorés des 30 jours de congés payés et, enfin, minorés du 1er mai.

Toutefois, en cas de rémunération manifestement insuffisante au vu des heures de travail effectuées par le salarié sous convention de forfait, la loi maintient la possibilité de solliciter une indemnisation devant le Conseil de Prud’hommes .

Afin d’encourager les salariés à renoncer à des jours de congés dans le cadre d’une convention de forfait, il est prévu des incitations fiscales et sociales jusqu’au 31 décembre 2009 (exonérations d’impôt sur le revenu et de charges sociales) .

Par ailleurs, la loi apporte une nouvelle obligation à la charge de l’employeur ayant mis en place des conventions de forfait en jours. Il devra organiser un entretien annuel individuel avec chaque salarié concerné. Cet entretien portera sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié .


V. Le droit à congés payés dès dix jours de travail

La loi réduit de un mois à dix jours la durée minimale de travail requise dans l'entreprise pour ouvrir droit au congé annuel . Il s’agit d’un amendement adopté par le Parlement, avec l’approbation du Gouvernement, et présenté pour mettre le droit français en conformité avec les exigences européennes .


VI. La répartition et l’aménagement du temps de travail

La loi unifie le régime de la modulation et des jours de RTT en remodelant l’ensemble des règles relatives à la répartition de l’horaire collectif.

Pour répartir la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année et pour aménager le temps de travail, il est reste possible d’établir un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche .

Le délai de prévenance de 7 jours avant de modifier l’horaire collectif de travail reste applicable. Néanmoins, il n’est plus nécessaire de justifier des caractéristiques particulières de l’activité pour réduire ce délai de prévenance par accord collectif .

A défaut d’accord collectif, un décret permettra à l’employeur d’instaurer sans concertation la répartition des horaires sur plusieurs semaines.

De même, dans les entreprises qui fonctionnent en continu, désormais l’employeur peut unilatéralement organiser le temps de travail sur plusieurs semaines .

La loi apporte une nouveauté concernant la notion de semaine de travail : il est désormais possible de prévoir par accord d’entreprise ou d’établissement que la semaine de travail débute à un moment de la semaine autre que le lundi à 0 heure .


VII. Les règles relatives au Compte Epargne Temps (CET)

Les règles relatives au CET font l’objet d’une refonte, essentiellement de forme .

Sur le fond, la réforme vise à faciliter l’utilisation du CET par le salarié. Ainsi, nonobstant les stipulations de la convention ou de l’accord collectif, tout salarié peut, sur sa demande et en accord avec son employeur, utiliser les droits affectés sur le CET pour compléter sa rémunération .

La loi prévoit une exonération d’impôt sur le revenu et de cotisations salariales et des cotisations patronales concernant les rachats de temps comptabilisés au CET et investis dans un plan de retraite collectif ou dans les garanties collectives (régime complémentaire de santé ou de retraite, etc…). L’exonération est possible dans la limite de 10 jours par an et soumise à la condition que les jours crédités ne proviennent pas d’un abondement de l’employeur. Par ailleurs, la loi précise que les salaires ainsi investis par le salarié sont réintégrés dans l’assiette permettant de déterminer sa taxe d’habitation et sa taxe foncière .





Cet article n'engage que son auteur.

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