Droit des assurances

Précisions sur le régime de la subrogation légale de l'assureur

Publié le : 31/01/2022 31 janvier janv. 01 2022

Il résulte de l’article L. 121-12 alinéa 1er du Code des assurances, selon lequel l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions des assurés contre les tiers qui par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur, que la subrogation n'a lieu que lorsque l'indemnité a été versée en application des garanties souscrites. 

Il n'est en revanche pas distingué selon que l'assureur a payé l'indemnité de sa propre initiative, ou qu'il l'a payée en vertu d'un accord transactionnel ou en exécution d'une décision de justice. 

Dans son arrêt rendu le 16 décembre 2021 (Cass, 3ème civ, 16 décembre 2021, n° 20-13.692), la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le caractère indifférent des circonstances du règlement de l’indemnité (protocole transactionnel ou exécution d’une décision de justice).

En l’espèce, à la suite d'un incendie survenu ayant endommagé un magasin dont elle était propriétaire, le propriétaire avait conclu, avec son assureur, un protocole d'accord pour l'indemnisation du sinistre.
Un désaccord étant toutefois survenu entre les parties concernant les modalités d'évaluation de certains dommages, l'assureur avait été condamné à payer un solde d'indemnisation complémentaire à son assuré.

L'assureur a alors exercé un recours judiciaire à l’encontre du tiers dont la responsabilité était mise en cause, afin d'obtenir sa condamnation à lui payer le montant de sommes réglées à l’assuré et à le relever et garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

Selon les juges d’appel, seuls les règlements spontanés de l’assureur, intervenant en application des contrats d’assurance souscrits, pouvaient donner lieu à un recours subrogatoire.

Mais tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui s’en tient à la lettre de l’article L. 121-12, alinéa 1er, du Code des assurances et dont il résulte que la subrogation n'a lieu que lorsque l'indemnité a été versée en application des garanties souscrites. 

Ce principe est acquis et régulièrement rappelé par la Cour de cassation (cf. notamment Cass, 2ème civ, 5 juillet 2006, n° 05-11.729, F-D ; Cass, 2ème civ, 24 mars 2016, n° 15-11.319). 

Autrement dit, le fondement du règlement ne peut être autre que le contrat d’assurance.

Cela étant acquis, peu importe que le règlement intervienne spontanément, « de sa propre initiative » ou non.
 
La Cour de cassation l’a d’ailleurs indiqué tout récemment à propos de l’exécution d’une décision de justice (Cass, 3ème civ, 17 novembre 2021, n° 20-19.182), en retenant que l’exécution d’une décision de justice participe d’un paiement au sens de ces dispositions, quand bien même la décision n’aurait pas encore été purgée de tous délais de recours.

La règle est donc parfaitement claire, en ce sens que la subrogation n'a lieu que lorsque l'indemnité a été versée en application des garanties souscrites et il n'est pas distingué selon que l'assureur a payé l'indemnité de sa propre initiative, ou qu'il l'a payée en vertu d'un accord transactionnel, ou bien encore d’une décision de justice.

Par ailleurs, cet arrêt rappelle également qu’il résulte de l'article L. 121-12, alinéa 1er, du Code des assurances que la subrogation légale, qu'il institue, a lieu dans la mesure de ce qui a été payé à l’assuré et dans la limite de la créance détenue par l'assuré contre le responsable. 

En conclusion, en cas de recours subrogatoire de l’assureur, il apparait nécessaire de penser à vérifier : 

1- L’existence d’un recours : la subrogation est conditionnée à l’existence d’une action de l’assuré contre un tiers responsable.

2- Que l’indemnisation a bien été versée par l’assureur à son assuré : l'assureur, qui n'a pas encore versé d'indemnité d'assurance, ne peut se prévaloir d'une subrogation dans les droits de son assuré (Cass, 2ème civ, 21 mai 2015, n° 14-14.812), alors qu’il ne peut être prétendu à l’existence d’une subrogation si l’indemnité n’a pas été payée entre les mains de l’assuré et que cette indemnisation ait été faite en exécution du contrat d’assurance, autrement dit l'assureur doit avoir honoré ses engagements au titre des contrats d'assurance souscrits.

3- Que l’assureur sollicite sa subrogation uniquement dans la mesure de ce qui a été payé : le plus souvent les assureurs vont demander le remboursement des sommes réglées et une garantie de toute les condamnations qui pourrait être prononcée à son encontre, alors que la jurisprudence ne manque pas d’insister sur le fait que le recours de l’assureur contre le tiers responsable est limité au montant de l’indemnité versé à l’assuré.

Cass, 3ème civ., 16 décembre 2021, n° 20-13.692



Cet article a été rédigé par Karen VIEIRA, juriste au sein du cabinet ANTARIUS AVOCATS. Il n'engage que son auteur.

 

Auteur

Karen VIEIRA

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