Transport aérien : même hors Europe le retard peut être indemnisé

Transport aérien : même hors Europe le retard peut être indemnisé

Publié le : 09/01/2017 09 janvier janv. 01 2017

Le règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004 a fixé les règles communes en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers, en cas de refus d'embarquement, annulation ou retard important d'un vol, en considération des seuils suivants (Cour de justice de l’Union européenne, jurisprudences "Sturgeon" C-402/07 et C-432/07 du 19 novembre 2009 ; et "Nelson" C-581/10 et C-629/10 du 23 octobre 12) :
 
  • indemnité forfaitaire de 250 € à partir de 3 heures de retard sur un vol de moins de 1 500 km ; 
  • indemnité forfaitaire de 400 € à partir de 3 heures de retard pour un vol de plus de 1 500 km au sein de l’UE ou de 1 500 à 3 500 km hors de l’UE ; 
  • indemnité forfaitaire de 600 € à partir de 4 heures de retard pour un vol de plus de 3 500 km. 

Précision importante : suivant les articles 6 et 7 du règlement précité, l’indemnisation n’est prévue (a) que pour les vols au départ d’un pays membre de l’UE (quelle que soit la compagnie empruntée et le lieu de destination), ou (b) que pour les vols à destination d’un pays de l’UE, à condition de voyager sur une compagnie européenne.

L’heure d’arrivée d’un vol : quel critère ?

Une première question a été posée en pratique : pour calculer l’ampleur du retard d’un vol, quel doit être le fait générateur de l’arrivée ? La Cour de justice de l'Union européenne a précisé que "ce n’est qu’au moment où au moins l’une des portes de l’avion s’ouvre, que l’ampleur du retard peut être déterminée aux fins d’une éventuelle indemnisation" (Affaire C-452/13 du 4 septembre 2014).

Oui, mais quid des vols avec correspondances ou avec escales hors UE ?

Les vols moyens et longs courriers au départ des pays membres de l'Union européenne à destination de pays tiers font souvent l'objet de correspondances ou escales dans des Etats non membres de l'UE. Quid alors du retard constaté sur le dernier vol, hors UE, à partir d’un pays non membre de l’UE (exemple : Paris-Tokyo avec escale à Dubaï, opéré par une compagnie européenne ; retard constaté sur le vol Dubaï-Tokyo) ?

La cour de cassation vient de nous apporter réponse à cette question dans son arrêt du 30/11/2016 (n°15-21.590) : "ayant subi un retard de plus de trois heures à l'arrivée à Kuala-Lumpur, leur destination finale, M. et Mme Y avaient droit à une indemnisation, peu important que le vol en cause, qui constituait la correspondance d'un vol au départ d'un aéroport situé sur le territoire d'un État membre soumis aux dispositions du traité, au sens de l'article 3, § 1, sous a), du même règlement et dont le retard était à l'origine de la correspondance manquée à Dubaï, ait été au départ d'un aéroport situé dans un pays tiers, à destination d'un autre pays tiers et réalisé par un transporteur aérien effectif non communautaire".

La Cour de cassation a ainsi consacré une protection accrue pour les passagers victimes de retards importants, quand bien même le retard surviendrait lors d'une correspondance dans un Etat hors UE et dont le vol vers la destination finale serait assuré par une compagnie non européenne ; prime étant ainsi conférée à l'aéroport de départ en tant que déclencheur de l'indemnisation

La question en suspens : la notion de circonstances extraordinaires.

L’arrêt de la Cour de cassation du 30 novembre 2016 laisse subsister une zone d’ombre : la notion de « circonstances extraordinaires » exonérant les compagnies aériennes de toute indemnisation liée à un retard n’est pas précisée. La haute Cour en a simplement défini les attributs. La circonstance extraordinaire est celle qui, par sa nature ou son origine, n’est pas inhérente à l’activité normale du transporteur aérien.

Dans son arrêt du 30/11/2016 (op.cit), la Cour de cassation nous renseigne sur le fait qu’un incident technique est inhérent à l’activité normale d’un transporteur aérien. L’indemnisation est donc due à raison du retard contracté de ce chef. Quid d’un risque naturel ? Dans sa décision du 31 janvier 2013 suite à l’éruption du volcan islandais Eyjafjöll (affaire C-12/11), la Cour de justice de l'UE a jugé qu'il s’était agi là d'une circonstance exceptionnelle. On pourrait donc en déduire que les risques naturels ne sont pas inhérents à l'exercice normal de l'activité du transporteur aérien et qu’en conséquence, les retards contractés pour cela ne sont pas indemnisables.

La solution à retenir :

Sauf circonstances extraordinaires qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérentes à l’activité normale du transporteur aérien, celui-ci est tenu d’indemniser les passagers en application des règles européennes en cas de retard constaté à l’ouverture de la porte de l’appareil à l’arrivée, quand bien même le retard surviendrait lors d'une correspondance dans un Etat hors UE et dont le vol vers la destination finale serait assuré par une compagnie non européenne ; prime étant ainsi conférée à l'aéroport de départ en tant que déclencheur de l'indemnisation.


Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Oleksandr Rozhkov - Fotolia.com

 

Auteur

GADY Stephan

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