Précisions sur la décision qui fixe la rémunération du gérant majoritaire dans une SARL

Précisions sur la décision qui fixe la rémunération du gérant majoritaire dans une SARL

Publié le : 07/11/2011 07 novembre nov. 11 2011

La délibération de l'assemblée générale d'une Société à responsabilité limitée (SARL) relative à la rémunération du gérant n'est pas une convention réglementée, le gérant peut donc prendre part au vote.

Fixation de la rémunération du dirigeant et abus de majoritéL'abus de majorité est constitué si une délibération était contraire à l'intérêt social et adoptée dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité.




Cour de cassation, Chambre commerciale, 4 octobre 2011, pourvoi n°10-23398.


Les faits:

Une société X a trois associés :

Deux personnes physiques A et B,
Et une société C dont le gérant est Monsieur A.

Monsieur A et la société C détiennent ensemble 51% des parts de cette société.

Les deux associés personnes physiques, A et B, sont désignés en qualité de cogérants de la société lors de sa constitution en 2005. Ils ne perçoivent aucune rémunération à ce titre.

Par délibération du 31 juillet 2008, l'Assemblée met un terme aux fonctions de gérant de B. A demeure donc alors seul gérant.

Par une délibération du 30 décembre 2008, l'Assemblée décide de fixer la rémunération de la gérance à compter de 2008 à une somme équivalente à 50% de l'excédent brut d'exploitation (EBE).

Le gérant récemment démit de ses fonctions, juge que cette délibération est constitutive d'un abus de majorité. Il demande judiciairement la nullité de la délibération annulée et la condamnation de l'autre cogérant à payer des dommages et intérêts.

La Cour d'appel juge que le gérant ne pouvait prendre part aux votes et juge que l'abus de majorité est constitué. Elle juge que la rémunération n'avait pas à être fixée par le seul porteur des parts y ayant un intérêt personnel.

Elle juge ensuite que cette rémunération est excessive car comportant dans son contenu des éléments destinés à la préservation du patrimoine social. La Cour d'appel juge que cette décision provoque une rupture dans l'égalité des droits des porteurs à la répartition des bénéfices.


Analyse de lé décision de la Cour de cassation:

La Cour de cassation était donc interrogée sur deux points de droit :

- la participation ou non du gérant majoritaire au vote de sa rémunération,
- Les conditions de la constitution d'un abus de majorité.

La Cour de cassation censure doublement cette décision.

Sur la question de la participation de l'associé majoritaire gérant au délibération de l'assemblée fixant la rémunération.

La Cour de cassation énonce tout d'abord que « la détermination de la rémunération du gérant d'une société à responsabilité limitée par l'assemblée des associés ne procède pas d'une convention, ce dont il résulte que le gérant associé, fût-il majoritaire, peut prendre part au vote ».

La Cour de cassation confirme ainsi que la rémunération du gérant n'est pas une convention réglementée qui impose au gérant de ne pas participer aux votes.

Cette question avait déjà été tranchée dans une précédente décision de la Chambre commerciale (Cour de cassation, chambre commerciale 4 mai 2010 pourvoi numéro 09-13205). Cette solution découle du caractère unilatéral de la décision de l'assemblée qui fixe la rémunération du gérant.

L'apport de cette décision est qu'elle applique cette solution à un associé majoritaire.


Sur l'abus de majorité dans la fixation de la rémunération du gérant.

La Cour de cassation sur le second moyen du pourvoi reproche ensuite à la Cour d'appel d'avoir ainsi statuée « sans expliquer en quoi la délibération ayant arrêté la rémunération litigieuse, considérée en elle-même, avait été prise contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ».

Cette position de la Cour de cassation n'est pas nouvelle. Elle avait été notamment affirmée dans un arrêt du 18 avril 1961. Elle est conforme à la définition donnée par une partie de la doctrine (notamment Daniel Tricot - RTD Com 1994 p 617).

Cette décision présente en revanche un fort intérêt didactique car elle rappelle quelles sont les conditions de l'abus de majorité.

L'abus de majorité doit être par nature exceptionnel puisqu'il s'agit de détourner le droit pour les majoritaires dans une société de prendre une décision.

L'abus de majorité comme le confirme une nouvelle fois la Cour de cassation est constitué si :

- la délibération est contraire à l'intérêt social,
- la délibération est prise dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité.





Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © KonstantinosKokkinis - Fotolia.com

Auteur

VIBERT Olivier
Avocat Associé
Olivier VIBERT
PARIS (75)
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