De l’importance des mentions inscrites sur le panneau d’affichage d’une autorisation d’urbanisme au regard des délais de recours

De l’importance des mentions inscrites sur le panneau d’affichage d’une autorisation d’urbanisme au regard des délais de recours

Publié le : 08/01/2015 08 janvier janv. 01 2015

En matière d’urbanisme et aux termes de l’article R. 600-2 du Code de l’urbanisme, le recours ouvert aux tiers contre les permis de construire est enfermé dans un délai de deux mois à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage, sur le terrain, d’une mention de l’obtention du permis de construire.A défaut d’affichage régulier pendant une période continue, dont la charge de la preuve appartient au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanise, il est reconnu aux tiers la possibilité de saisir la juridiction administrative sans délai.

L’affichage complet sur le terrain est donc un élément fondamental en terme de sécurité juridique pour le bénéficiaire du permis de construire qui doit donc être particulièrement vigilant quant aux mentions apposées sur le panneau de permis.

De manière générale, il convient de rappeler que le panneau doit être apposé sur le terrain assiette du projet (CE, 28 avril 2000, n°198565) et doit être visible depuis la voie publique (CE, 21 juin 2013, n°360860).

Le contenu du panneau d’affichage est défini par les dispositions des articles A. 424-16 et A. 424-17 du Code de l’urbanisme aux termes desquelles :

« Le panneau prévu à l'article A. 424-1 (1) indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté.

Il indique également, en fonction de la nature du projet :

a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel ;

b) Si le projet porte sur un lotissement, le nombre maximum de lots prévus ;

c) Si le projet porte sur un terrain de camping ou un parc résidentiel de loisirs, le nombre total d'emplacements et, s'il y a lieu, le nombre d'emplacements réservés à des habitations légères de loisirs.

d) Si le projet prévoit des démolitions, la surface du ou des bâtiments à démolir ».


« Le panneau d'affichage comprend la mention suivante :

" Droit de recours :

" Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme).

" Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme). »

La nature et la portée des omissions ou erreurs dans les mentions portées sur le panneau d’affichage est appréciée par les juridictions du fond.

De manière générale, le juge administratif analyse attentivement si l’erreur/omission a été de nature à priver les tiers de la possibilité de percevoir la portée du permis de construire, dans le cadre d’une appréciation réaliste et pragmatique.

Ainsi, les erreurs peu importantes ne suffisent pas à empêcher le délai de recours de commencer à courir (CE, 28 avril 2000, n°198565).

C’est dans ce cadre que les juridictions administratives de NANTES ont eu l’occasion de connaitre de l’omission de certaines mentions d’un panneau d’affichage.

En l’espèce, le pétitionnaire avait fait dresser deux constats d’huissier établis à deux mois d’intervalle attestant que le panneau d’affichage portait les mentions suivantes :

« Nature de travaux : CONSTRUCTION D’UN IMMEUBLE D’HABITATION ».

Or, il s’avérait que le permis de construire comprenait également des démolitions sur une emprise non négligeable, ainsi que des prescriptions obligatoires uniquement liées à la démolition de l’immeuble.

Les requérants considéraient que l’absence de cette mention constituait l’omission d’un élément substantiel, qui ne leur permettait pas d’appréhender la portée totale du permis de construire et la consistance exacte du projet.

Saisi en première instance, le Président du Tribunal administratif de NANTES avait considéré que la requête était entachée d’irrecevabilité manifeste pour cause de tardiveté dès lors que le recours contentieux avait été enregistré plus de deux mois après l’expiration du délai, considérant implicitement que les mentions portées sur le panneau d’affichage étaient suffisantes pour faire courir le délai de recours.

Dans une espèce similaire, où le permis de construire accordé autorisait également la démolition d’une maison d’habitation et d’une grange, il a été jugé que l’affichage n’était pas régulier en l’absence d’indication de toute démolition, ce d’autant plus que l’emprise et la nature des démolitions n’étaient pas négligeables (CAA NANCY, 09 juin 2011, n°10NC01632 ; CAA NANTES, 8 avril 2011, n°10NT00137).

Dans un arrêt récent, la Cour administrative d’appel de NANTES s’est inscrite dans ce courant et a censuré le premier juge (CAA NANTES, 30 décembre 2014, n° 13NT02234).

Elle a ainsi relevé que le panneau d’affichage ne contenait aucune mention relative à la démolition des bâtiments en méconnaissance des dispositions de l’article A. 424-16 du Code de l’urbanisme ce qui ne permettait pas aux tiers d’apprécier pleinement la consistance exacte du projet.

La Cour précise encore que la circonstance qu’aucun moyen de droit ne soit articulé contre le permis de construire, en ce qu’il emportait démolition, ou que les requérants ont pu prendre connaissance du dossier de permis de construire, ne sont de nature à considérer que l’affichage était régulier.

« que, toutefois, il est constant que cet affichage ne comportait aucune mention des bâtiments à démolir, contrairement aux prescriptions de l'article A. 424-16 précité du code de l'urbanisme, alors que le permis délivré à la SCI prévoyait la démolition d’une maison individuelle et de l’immeuble mitoyen de deux étages situé à l’angle de deux voies publiques ; que le panneau d’affichage, apposé sur la palissade protégeant la seule maison individuelle, bien qu’il précise la surface de plancher à construire, ne permettait dès lors pas aux tiers d’être informés que la mise en œuvre du projet autorisé emportait la démolition de l’immeuble mitoyen, et par suite d’apprécier la consistance exacte de l’opération ; que dans ces conditions, alors même que les requérants n’ont soulevé à l’encontre du permis litigieux que des moyens relatifs à sa légalité sans contester la démolition autorisée par celui-ci, et par ailleurs, ont pu avoir accès au dossier de permis de construire produit dans le cadre de leur demande de première instance, l’affichage du permis doit être regardé comme ne comportant pas d’informations suffisantes pour faire courir le délai de recours contentieux prévu par les dispositions précitées de l’article R. 600-2 du code de l'urbanisme ».

Cette solution qui apparaît tant conforme aux dispositions réglementaires qu’à la jurisprudence majoritaire implique nécessairement qu’une très grande attention soit portée à la rédaction précise des mentions apposées sur le panneau d’affichage des autorisations d’urbanisme.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © d3images - Fotolia.com

Auteur

Flavien MEUNIER
Avocat Associé
LEXCAP NANTES
NANTES (49)
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