Clarification des conditions du caractère contradictoire de la réception expresse

Clarification des conditions du caractère contradictoire de la réception expresse

Publié le : 23/06/2015 23 juin juin 06 2015

La notion de réception, pierre angulaire du régime de responsabilité des constructeurs issu des articles 1792 et suivants du Code Civil, vient de connaître une nouvelle évolution ou, plus exactement, ce que certains pourront qualifier de révolution.Civ. 3, 03.06.2015 n° 14-17744, publié au bulletin


La définition ainsi que les formes et éléments constitutifs de la réception ont donné lieu à de nombreuses décisions qu’elles concernent la réception expresse ou la réception tacite.

L’absence de formalisme de cette dernière laisse naturellement place à une déclinaison de critères, objectifs ou subjectifs, nécessairement discutés.

La réception expresse, à laquelle cette brève d’actualité jurisprudentielle s’intéresse, bien que formalisée, n’échappe cependant pas aux fluctuations, discussions et interprétations.

L’arrêt récent rendu par la 3ème Chambre Civile le 3 juin 2015 (n°14-17744 publié au bulletin) est de nature à mettre un terme à certaines discussions nées d’un précédent arrêt (Civ 3 12/01/2011 n°09-70.262 : Jurisdata n°2011-000223) abondamment commenté.


Dans chacune des situations soumises à la Haute juridiction, un maître d’ouvrage avait manifesté sa volonté de réceptionner l’ouvrage en convoquant les entrepreneurs intervenus à l’acte de construire aux fins de réception.

Le principe discuté dans chacune de ces situations portait sur le caractère contradictoire de la réception définie par l’article 1792-6 alinéa 1 du Code Civil comme « l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves » laquelle réception doit être « en tout état de cause, prononcée contradictoirement ».

Le doute portant sur les conditions d’acquisition du caractère contradictoire de la réception a pu naître de l’arrêt rendu le 12 janvier 2011 au terme duquel « l’exigence de la contradiction ne nécessitait pas la signature formelle du procès-verbal de réception dès lors que la participation aux opérations de réception de celui qui n’a pas signé ne fait pas de doute ».

Il était donc permis de penser que la seule convocation des constructeurs aux opérations de réception ne suffisait pas à faire acquérir à cette réception un caractère contradictoire.

De cette motivation, il était possible de comprendre que l’absence de formalisation du procès-verbal de réception par l’entrepreneur présent, c'est-à-dire l’absence de signature du procès-verbal, ne permettait pas de faire échec au caractère contradictoire de la réception dès lors qu’il ne faisait pas de doute que l’entrepreneur dûment convoqué avait participé aux opérations de réception.

Il ne suffisait donc plus pour le maître d’ouvrage souhaitant réceptionner de s’assurer la preuve de la convocation des entrepreneurs aux opérations de réception pour que celle-ci puisse valablement être caractérisée.

Il aurait fallu, au terme d’une certaine lecture, que le maître de l’ouvrage s’assure la preuve de la participation de l’entrepreneur dûment convoqué à défaut de recueillir sa signature sur le procès-verbal de réception.

Et que faire en l’absence de certains entrepreneurs dûment convoqués ?

L’arrêt rendu le 3 juin 2015 par la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation apparaît de nature à mettre un terme aux débats en reposant des principes conformes à la jurisprudence antérieurement établie en ce qu’il précise de manière motivée qu’une Cour d’Appel en retenant « que le procès-verbal de réception signé par la SCI le 26 octobre 2005 caractérisait la volonté du maître de l’ouvrage de recevoir les […] bâtiments […] a relevé à bon droit que, dès lors que M. Y… avait été dûment convoqué aux opérations de réception, son absence le 26 octobre 2005 ne saurait priver ce procès-verbal de son caractère contradictoire ».

Cette motivation est donc de nature à réaffirmer tout d’abord que la réception est caractérisée par la volonté du maître de l’ouvrage de recevoir l’ouvrage.

Il s’agit de « l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves ».

Cette décision est encore de nature à confirmer que la signature du procès-verbal de réception par le maître de l’ouvrage caractérise cette volonté et suffit à la bonne formalisation de la volonté du maître de l’ouvrage de recevoir l’ouvrage.

Cette décision permet encore de rappeler que l’absence de signature de l’entrepreneur sur le procès-verbal de réception est indifférente à la bonne formalisation de la réception.

Bien plus, cette décision clarifie le débat en réaffirmant que l’absence de l’entrepreneur aux opérations de réception n’est pas de nature à priver le procès-verbal de son caractère contradictoire dès lors qu’il a été dûment convoqué aux opérations de réception.

La participation des constructeurs aux opérations de réception n’est pas un élément nécessaire à la réception dès lors qu’ils ont été dûment convoqués.

Il est donc important pour les constructeurs dûment convoqués de participer aux opérations de réception en ce qu’ils ne pourront pas échapper à l’opposabilité du procès-verbal de réception dès lors qu’ils ont été dûment convoqués.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © julien tromeur - Fotolia.com

Auteur

FOUCHERAULT Sébastien
Avocat Associé
AVODES , Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
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