Congé du locataire commercial et renonciation :  Quelles conséquences ?

Congé du locataire commercial et renonciation : Quelles conséquences ?

Publié le : 05/07/2017 05 juillet juil. 07 2017

Quelles conséquences lorsqu'un locataire commercial, après avoir délivré un congé, ne quitte pas les lieux et paye une indemnité d'occupation au bailleur?


Un locataire commercial a délivré un congé le 28 mars 2008 pour une échéance triennale au 30 septembre 2008.

Cependant, il n’a pas quitté les lieux à cette date et ensuite engagé des pourparlers avec son bailleur afin d’obtenir la prorogation de l’effet de son congé.


Le locataire s’est maintenu dans les lieux jusqu’au mois de juin 2009 après paiement d’une indemnité d’occupation qualifiée de loyer par le bailleur.

Le bailleur a souhaité être payé de l’intégralité des loyers jusqu’à l’échéance triennale du 30 septembre 2011 considérant que le locataire en se maintenant dans les lieux avait irrévocablement renoncé à son congé délivré le 28 mars 2008 à effet au 30 septembre 2008.

Le locataire a cru réitérer le 1er février 2011 la délivrance d’un congé pour l’échéance triennale du 30 septembre 2011 tout en mentionnant expressément qu’il n’entendait pas renoncer au congé délivré pour l’échéance du 28 mars 2008.

Les juridictions du fond avaient le choix entre deux solutions :

 
  • Considérer que le premier congé à échéance au 30 septembre 2008 avait été donné irrévocablement, de sorte que les indemnités d’occupation n’étaient dues qu’au jour de la libération des lieux, à savoir au 30 juin 2009 ;
     
  • Soit considérer qu’en se maintenant dans les lieux et en réglant des loyers, le locataire avait renoncé à son congé au 30 septembre 2008 et était tenu d’une nouvelle période triennale s’achevant au 30 septembre 2011.

La Cour d’Appel d’Aix en Provence, dans son arrêt du 20 septembre 2013 avait considéré que le bailleur n’avait jamais accepté la rétractation de son locataire et que le congé délivré le 28 mars 2008 à échéance triennale du 30 septembre 2008 était irrévocable, de sorte que le locataire n’était pas tenu de régler des loyers jusqu’à l’échéance triennale suivante au 30 septembre 2011.

La Cour de Cassation a cassé cet arrêt de la Cour d’Appel d’Aix en Provence, considérant que la Cour d’Appel n’avait pas répondu aux conclusions par lesquelles la bailleresse soutenait que le locataire avait renoncé au bénéfice de son congé en se maintenant dans les lieux et en payant les loyers.

L’affaire doit revenir à la connaissance de la Cour d’Appel d’Aix en Provence qui va sans doute s’incliner et considérer que le seul maintien dans les lieux et le règlement de loyers équivaut à un renoncement au premier congé délivré le 28 mars 2008 pour l’échéance triennale du 30 septembre 2008.

Le locataire aura sans doute à payer l’ensemble des loyers jusqu’à l’échéance triennale au 30 septembre 2011.
 

La Cour de Cassation n’a pas toujours eu cette position.


Dans une célèbre affaire en date du 30 septembre 2009 concernant l’enseigne MAC’DONALDS France, elle avait considéré qu’un congé délivré par erreur par une Etude d’huissiers, sans mandat pour se faire, alors que la locataire souhaitait au contraire voir renouveler son bail, devait être considéré comme  irrévocable  nonobstant l’attitude et les intentions du locataire.

La décision de la Cour de Cassation du 30 mars 2017 apparaît tout à fait logique.

En effet, il convient de s’attacher à l’attitude des parties postérieurement à la délivrance du congé plutôt qu’à l’acte de congé lui-même.

En l’espèce, le locataire souhaitait une prolongation des effets du congé.
Or, une prolongation des effets du congé ne peut intervenir qu’avec l’accord du bailleur.

La seule conséquence juridique d’une prolongation sans accord du bailleur doit entraîner l’impossibilité de voir le bail résilier sans attendre la nouvelle échéance triennale du bail.

Cette décision prend plus en compte l’attitude et l’intention des parties et paraît plus équitable.
Elle marque toutefois une évolution de l’appréciation de la Cour de Cassation sur cette question particulière.


Arrêt Cour de Cassation – 30/03/2017 n°15-20559


Cet article n'engage que son auteur.


Crédit photo: © kotoyamagam - Fotolia.com
 

Auteur

MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration
GRENOBLE (38)
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