Les pratiques restrictives de concurrence
Publié le :
09/12/2008
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2008
Dorénavant, le ministre pourra agir contre les distributeurs sans l'aval des fournisseurs lésés et même face au refus exprimé de ces derniers.
L'action autonome du ministre de l'économieLes distributeurs, dans leurs rapports de force avec les fournisseurs, peuvent se livrer à ce qu'il est appelé des pratiques restrictives de concurrence, pratiques qui contrairement aux pratiques anticoncurrentielles n'ont pas un effet néfaste sur le marché mais impactent une relation bilatérale fournisseur-distributeur.
Cette dénomination, recouvre plusieurs réalités exposées par l'article L 442-6 du code de commerce .
C'est le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu.
C'est aussi le fait de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
C'est le fait aussi d'obtenir ou de tenter d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l'assortir d'un engagement écrit.
C'est le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace de rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives.
C'est le fait de rompre brutalement des relations commerciales établies.
●Cependant un fournisseur a-t-il vraiment intérêt à agir contre un distributeur, qui représente peut-être sa seule source de revenu ?
C'est la raison pour laquelle une première solution a été trouvée en donnant un pouvoir accru au ministre de l'économie. Certaines de ces pratiques peuvent constituer des délits et sont donc affectées de sanctions pénales.
L'article L 442-6 III prévoit d'autres sanctions pour ces mêmes pratiques.
Tout d'abord il y a un volet curatif, le ministre ayant le pouvoir de faire cesser les pratiques visées et de prononcer la nullité des clauses ou contrats illicites.
Il y a également un volet répressif, le ministre peut prononcer une amende civile ne pouvant dépasser deux millions d'euros, et enfin demander la répétition de l'indu. Mais, si le Code de Commerce définit le pouvoir d'action du ministre, la cour de cassation dans son arrêt du 8 juillet 2008 est venue préciser la nature de cette action :
« Attendu que l'action du ministre chargé de l'économie, qui tend à la cessation des pratiques qui sont mentionnées dans l'article L442-6 du code de commerce, à la constatation de la nullité des clauses ou contrats illicites, à la répétition de l'indu et au prononcé d'une amende civile, est une action autonome de protection du fonctionnement du marché et de la concurrence qui n'est soumise au consentement ou à la présence des fournisseurs ».
Dorénavant, le ministre pourra donc agir contre les distributeurs sans l'aval des fournisseurs lésés et même face au refus exprimé de ces derniers.
Pour justifier une telle décision, la Cour de Cassation invoque des principes de protection du marché et de la concurrence.
Cependant, une telle justification ne peut être de nature à nous faire perdre de vue l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme selon lequel la victime, ici le fournisseur, est le maitre de la demande et que donc nul ne peut plaider par procureur.
Sans avoir la critique facile, cette décision va à l'encontre de ce principe.
Par cet arrêt, la cour de cassation vient casser un arrêt de la cour d'appel qui avait jugé que l'action du ministre de l'économie n'était possible qu'à condition d'avoir recueilli le consentement du titulaire de l'action. La Cour de Cassation rejette cette protection théorique,les fournisseurs en effet, n'auraient jamais donné leur consentement, pour préférer une protection effective.
L'importance de la décision du 8 juillet 2008, doit être appréciée sur le plan de la répétition de l'indu. Il s'agit dans notre hypothèse, pour le distributeur, de restituer au fournisseur des sommes que celui-ci a versé et qui n'étaient pas dues, cela sera par exemple le cas quand le distributeur aura facturé des services (mise des produits en tête de gondoles…) alors que ces services n'ont reçu aucune exécution. Des sommes considérables sont en jeu : les services qu'un distributeur facture à un fournisseur peuvent se chiffrer à plusieurs dizaines de millions d'euros.
Par cet arrêt, la Cour de Cassation décomplexe les fournisseurs . On passe clairement d'un mécanisme de sanction à un mécanisme d'indemnisation. Rappelons que depuis la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, le distributeur est tout à fait libre –sous réserve de l'abus- de discriminer ses fournisseurs. Le ministre vient insuffler un vent de loyauté dans la relation commerciale.
L'auteur de cet articleAller sur le site de l'Office Notarial de Baillargues. Cet article n'engage que son auteur.
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