Les accords de coexistence en droit des marques et les collectivités territoriales

Publié le : 01/02/2013 01 février févr. 02 2013

La majeure partie des signes ayant été réservés à titre de marques, face à cette pénurie qui nécessite d'user de néologismes, une solution s'impose: la négociation d'accords de coexistence. Un montage juridique qui par contagion gagne les collectivités.

Les accords de coexistence : des accords iréniques entre partenaires privés et publics1. / Le constat est unanime: il est aujourd’hui de plus en plus difficile de trouver un signe qui ne risque pas de créer une confusion avec une marque antérieurement enregistrée.

Dans ce contexte, le recours aux accords de coexistence apparaît comme un outil indispensable pour prévenir et/ou régler les conflits pouvant intervenir entre les titulaires de marques.

Les accords de coexistence, permettent en effet aux titulaires d’organiser pacifiquement la coexistence de leurs signes, les modalités de coexistence étant laissées au libre choix des parties sous l’unique réserve du principe de l’interprétation stricte de l’accord : le contrat peut ainsi délimiter le territoire d’exploitation ou les produits et/ou service concernés par chaque signe. Des dispositions peuvent également assurer l’expansion internationale de chaque partie, chacune d’entre elles reconnaissant les droits de l’autre et s’engageant à ne pas contester les dépôts qui pourront être faits dans le futur.

L’intérêt de ce genre d’accord compte tenu de l’explosion du nombre de dépôts de marque n’est donc plus à démontrer.

Surtout utilisés par les entreprises du secteur privé, les accords de coexistence intéressent aujourd’hui les collectivités territoriales.

2. / La ville de Paris a ainsi pu faire l’expérience de l’utilité de ce genre d’accord dans le cadre du litige qui l’opposait à la société EUROPCAR.

Tout le monde se souvient du feuilleton judiciaire qui s’est joué entre ces deux protagonistes autour de la marque AUTOLIB’.

La société EUROPCAR, titulaire de la marque AUTOLIBERTE, avait assigné la ville de Paris en contrefaçon et concurrence déloyale suite au dépôt de la marque AUTOLIB’ au motif que cette marque créait un risque de confusion avec le service proposé par EUROPCAR sous la marque AUTOLIBERTE et permettant aux clients abonnés de se faire livrer la voiture de leur choix devant chez eux par simple coup de fil.

Déboutée par le Tribunal de Grande Instance de Paris, la société EUROPCAR avait interjeté appel et obtenu gain de cause devant la Cour qui, par un arrêt du 29 juillet 2012, annulait la marque AUTOLIB’ et condamnait la ville de Paris à changer le nom de son service d’autopartage dans un délai d’un mois et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée.

La société EUROPCAR et la ville de Paris se sont finalement rapprochées afin de négocier un accord de coexistence assorti d’un partenariat publicitaire aux termes duquel la société EUROPCAR renonce au bénéfice et à l’exécution de l’arrêt du 29 juin 2012.

En contrepartie, la société EUROPCAR bénéficiera, en tant que partenaire, de la promotion publicitaire du service AUTOLIB’.

La ville de Paris demeure ainsi titulaire de la marque AUTOLIB’ et pourra continuer d’exploiter son service d’autopartage sous ce nom.

3. / L’intérêt de cet accord est indéniable quand on réalise les conséquences économiques qu’aurait pu avoir l’arrêt de la Cour d’Appel pour la collectivité : non seulement la ville était contrainte de trouver un nouveau nom à ce service ce qui supposait entre autres de nouveaux investissements publicitaires pour le promouvoir, mais aurait également dû faire disparaître dans un délai d’un mois, toute référence à la marque AUTOLIB’ sur les véhicules, les bornes, les abris, les badges des abonnés… Autant de dépenses que le concessionnaire de ce service n’entendait pas assumer [1] et qui auraient pesé extrêmement lourd sur le budget de la ville.

L’intérêt non seulement juridique mais surtout économique de l’accord de coexistence de marque apparaît ici très nettement.

Le choix de la ville de Paris de recourir à ce genre d’accord ne devrait pas manquer de servir d’exemple à d’autres collectivités territoriales à commencer par la ville de Lyon, qui déjà privée du service CAR 2 GO, suite à l’action en référé de la société CAR GO, pourrait également perdre le droit d’exploiter son service d’autopartage sous le nom «AUTOLIB’ UNE VOITURE JUSTE QUAND IL FAUT», du fait du litige l’opposant également à la société EUROPCAR, actuellement pendant devant la Cour d’Appel de Paris.

[1] « Autolib’ : une partie de billard à trois bandes entre la ville de Paris, Bolloré et Eurazéo », 03/07/2012, www.latribune.fr SUR LE MEME THEME:Le Petit Musée des marques, "Europcar vs ville de Paris : accord de coexistence entre les marques AUTO LIBERTE et AUTOLIB'", Frédéric Glaize, 4 décembre 2012.





Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

HERITIER-PINGEON Betty

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