Assurance "dommages ouvrages": exercice de l'action subrogatoire avant paiement

Publié le : 17/12/2009 17 décembre déc. 12 2009

Si le paiement de l'indemnité est une condition indispensable pour l'exercice par l'assureur dommages ouvrage de ses actions récursoires contre les constructeurs, la date du paiement n'est pas sans incidence sur l'exercice de ces recours.

A propos des arrêts rendus le 4 juin et le 8 septembre 2009 par la cour de cassationSi le paiement de l'indemnité est une condition indispensable pour l'exercice par l'assureur dommages ouvrage de ses actions récursoires contre les constructeurs, la date du paiement n'est pas sans incidence sur l'exercice de ces recours enfermés dans des délais de forclusion ayant pour point de départ la réception des ouvrages.

En effet, à l'instar du maître de l'ouvrage dans les droits et action duquel il sera subrogé après paiement, l'assureur dommages ouvrage doit exercer ses recours dans le délai de dix ans suivant la réception des ouvrages lorsqu'il intervient pour garantir des désordres de la nature de ceux visés par les articles 1792 et 1792-2 alinéa 2 du Code civil ou de deux ans si sa garantie est accordée pour les désordres visés par l'article 1792 dudit code.

Selon une jurisprudence désormais constante, la cour de cassation a posé la règle suivant laquelle il importe peu que l'assureur dommages-ouvrage, au moment de la délivrance de son assignation, n'ait pas encore la qualité de subrogé, faute d'avoir déjà payé l'indemnité d'assurance, dès lors qu'il justifie avoir payé ladite indemnité avant que le juge du fond n'ait statué.

Cf. en ce sens :

- Cour de cassation, 3° Chambre civile, 29 mars 2000, n° 98-19.505
- Cour de cassation, 3° Chambre civile, 4 avril 2001, n° 99-16.554
- Cour de cassation, 3° Chambre civile, 9 octobre 2001, n° 98-18.378
- Cour de cassation, 3° Chambre civile, 21 janvier 2004, n° 02-14.3910

Cette solution a été dégagée dans des hypothèses ou l'assureur dommages ouvrage avait assigné au fond, avant paiement, les constructeurs dans les dix ans de la réception.

Quid alors de l'effet interruptif de l'assignation en référé délivrée avant tout paiement dans les dix ans de la réception ?

Dans un arrêt inédit en date du 4 février 2004, la 3° Chambre civile de la Cour de cassation a approuvé une Cour d'Appel qui avait jugé irrecevable comme prescrite l'action d'un assureur dommages-ouvrage aux motifs qu'à la date à laquelle ce dernier avait délivré son assignation en référé, il n'avait pas payé l'indemnité, son action au fond consécutive étant jugée tardive.

Selon cette décision, l'assignation en référé avant paiement n'avait donc pas d'effet interruptif.

Il fallait toutefois réserver le cas où le maître de l'ouvrage dans les dix ans qui suivent la réception avait pris l'initiative d'interrompre le délai par une action en référé notamment aux fins de désignation d'expert non seulement contre l'assureur dommages-ouvrage mais également contre les constructeurs;

Dans cette hypothèse, bien que n'ayant pas fait délivrer son assignation au fond dans les dix ans qui suivent la réception, l'effet interruptif de l'assignation en référé du maître de l'ouvrage profitait nécessairement à l'assureur dommages-ouvrage, ce dernier après paiement étant alors subrogé dans les droits et actions de son assuré.

On pouvait donc déduire de ces décisions que si l'assureur dommages ouvrage disposait effectivement de tout le cours de l'instance jusqu'à ce que le juge statue sur le fond y compris en cause d'appel pour payer l'indemnité, encore fallait il que cette assignation au fond intervienne dans les dix ans de la réception, l'assignation en référé préalablement signifiée n'ayant pas d'effet interruptif en l'absence de paiement.


La Cour de cassation est revenue sur cette solution dans deux arrêts rendus à quelques mois d'intervalle publiés au bulletin, le premier le 4 juin 2009 (n° 07-18960), le second, le 8 septembre 2009 (n° 08-17012) ;

Désormais, la 3° Chambre civile de la Cour de cassation reconnaît un effet interruptif de prescription à l'assignation en référé délivrée par l'assureur dommage ouvrage avant tout paiement et reçoit ses recours dès lors qu'ils sont exercés par une assignation au fond délivrée dans les dix ans de l'ordonnance de référé.

Ces décisions viennent donc conforter l'exercice par l'assureur dommages ouvrage de ses recours notamment en fin de période de garantie et avant tout paiement de l'indemnité.



Cet article n'engage que son auteur.

Auteur

SAIMAN Francis

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