La femme enceinte et le droit du travail

La femme enceinte et le droit du travail

Publié le : 16/11/2011 16 novembre nov. 11 2011

Le Code du travail tend à protéger les salariées enceintes, aussi bien pendant la durée de la grossesse, alors qu'elles sont en activité, que pendant le congé de maternité, période de repos indemnisé.

Congé maternité, protection de la femme enceinte au travail, obligations de la femme enceinte« Le mystère de l’incarnation se répète en chaque femme ; tout enfant qui naît est un Dieu qui se fait homme. »
Simone De Beauvoir - Extrait de Le deuxième sexe.

Dans le monde du travail, une grossesse n'est jamais facile à vivre pour la future mère.
Ceci étant, le Code du travail tend à protéger les salariées enceintes, aussi bien pendant la durée de la grossesse, alors qu'elles sont en activité, que pendant le congé de maternité, période de repos indemnisé. Ce statut très protecteur est défini par la loi et est éventuellement amélioré par la convention collective de l'entreprise.

Au travers de cette étude, seront abordés les point suivants :
- Le congé maternité
- la protection de la femme enceinte au travail
- les obligations de la femme enceinte


  • I- Le congé maternité
Une salariée qui attend un enfant, y compris si elle est employée par un particulier, bénéficie d'un congé maternité, pendant lequel son contrat de travail est suspendu. Il se décompose en un congé prénatal (avant la naissance) et un congé postnatal (après la naissance). Contrairement aux autres congés, aucune condition n'est exigée en matière d'ancienneté ou de nature du contrat.

Quelle est la durée du congé de maternité ? Tout dépend du nombre d'enfants de la salariée nés et à naître.
Dans tous les cas, une période de repos de huit semaines est obligatoire, et dont six semaines après l'accouchement.
Ainsi, le congé maternité se décompose en une période prénatale et une période post-natale. La durée du congé prénatal et du congé postnatal dépend de la nature de la naissance et du nombre d'enfants, étant entendu que certaines conventions collectives prévoient des durées plus longues que celles ci-dessous.

Voici les principaux congés :

Naissance unique:

• pour la naissance d'un premier ou d'un deuxième enfant :
o avant l'accouchement : 6 semaines
o après l'accouchement : 10 semaines

• quand il s'agit d'un troisième enfant (ou plus) :
o avant l'accouchement : 8 semaines
o après l'accouchement : 18 semaines. Dans ce cas, la mère peut augmenter son congé prénatal dans la limite de deux semaines, la durée du congé postnatal étant réduite d'autant.

Naissances multiples:

• Quand la mère attend deux jumeaux
o avant l'accouchement : 12 semaines
o après l'accouchement : 22 semaines. Dans ce cas, la mère peut augmenter son congé prénatal dans la limite de quatre semaines, la durée du congé post-natal étant réduite d'autant.

• quand la mère attend des triplés ou plus
o avant l'accouchement : 24 semaines
o après l'accouchement : 22 semaines. Dans ce cas, la mère peut augmenter son congé prénatal dans la limite de quatre semaines, la durée du congé post-natal étant réduite d'autant.

Pendant le congé de maternité, le contrat de travail est simplement suspendu. Ce congé est donc comptabilisé comme du temps de travail effectif, notamment pour le calcul de l'ancienneté.
A la fin du congé maternité, la salariée doit retrouver l'emploi qu'elle occupait avant son départ en congé ou un emploi équivalent avec la même rémunération. Aucun changement du contrat de travail ne peut lui être imposé. La salariée doit passer une visite médicale de reprise dans les huit jours suivant son retour dans l'entreprise.

Pendant les quatre semaines qui suivent la fin du congé maternité, la salariée ne peut être licenciée que pour :
• faute grave de l'intéressée non liée à l'état de grossesse,
• motif économique (réorganisation de l'entreprise, fermeture de l'établissement, etc.).

La salariée peut aussi décider de ne pas reprendre son travail à l'issue de son congé. Contrairement aux procédures de droit commun, aucun préavis n'est imposé mais elle doit prévenir son employeur au moins quinze jours avant la date prévue de retour. Faute de quoi, elle devra, en principe, ensuite respecter les délais imposés par le contrat de travail ou la convention collective.

Une salariée qui ne reprend pas son travail à l'issue du congé peut demander à bénéficier d'une priorité de réembauchage, comme les salariés victimes d'un licenciement économique : dans l'année qui suit sa démission, l'employeur devra la prévenir des postes vacants correspondant à sa qualification par lettre recommandée avec AR et devra l'embaucher par priorité par rapport aux autres candidats. Et en cas de réembauche, la salariée retrouve la même ancienneté et les mêmes conditions de rémunération.

Il faut rappeler enfin que contrairement aux autres congés payés, le bénéfice du congé-maternité n'est soumis à aucune condition d'aucune sorte, notamment en matière d'ancienneté ou de nature du contrat. Quel que soit l'employeur, y compris s'il s'agit d'un particulier, le seul fait d'être enceinte ouvre droit pour la salariée au congé maternité, qui est par ailleurs assimilé à du temps de travail effectif (ancienneté, droit à la retraite, etc.).

En cas d'accouchement prématuré, les jours de congé prénatal qui n'ont pu être pris du fait de la survenue précoce de l'enfant prolongent d'autant le congé postnatal. En cas d'accouchement prématuré plus de six semaines avant la date prévue, la durée du congé légal de maternité est augmentée du nombre de jours entre l'accouchement et le début prévu du congé Sous réserve de l'avis favorable du médecin, la mère peut réduire son congé prénatal dans la limite de trois semaines, la durée du congé postnatal étant augmentée d'autant.

En cas de maladie liée à la grossesse ou à l'accouchement, ces durées peuvent être augmentées de deux semaines au plus pour le congé prénatal et de quatre semaines au plus pour le congé postnatal (naturellement sur présentation d'un certificat médical). Au-delà de ces durées, les périodes d'absence sont soumises au régime des arrêt-maladie, moins favorables en termes d'indemnisation ou de protection contre le licenciement.

Il convient de préciser que la salariée peut renoncer à tout ou partie de son congé maternité, sous réserve de respecter les périodes d'interdiction d'emploi : la loi interdit en effet aux employeurs de faire travailler une femme enceinte ou venant d'accoucher pendant une période totale de huit semaines, qui comprend obligatoirement les six semaines après l'accouchement.
Les salariés qui adoptent un enfant ont droit à un congé d'adoption, qui est régi par des règles spécifiques. Le père salarié peut également bénéficier d'un congé paternité.


  • II- La protection de la femme enceinte au travail
Une femme enceinte ne peut pas être licenciée pendant son congé maternité. Elle doit retrouver son poste ou un poste équivalent en salaire et en qualification à l'issue de son congé maternité.

Seules exceptions : une faute grave de la salariée non liée à son état, et le motif économique peuvent fonder un licenciement. Mais même dans ces cas, le licenciement ne peut pas être notifié ni prendre effet pendant le congé de maternité.

Si l'employeur refuse d'annuler un licenciement injustement prononcé, la salariée doit naturellement saisir le conseil des Prud'hommes. Et en cas de refus de réintégration, l'employeur devra lui verser le montant des rémunérations qu'elle aurait dû percevoir jusqu'à la fin de son congé maternité, auquel s'ajoutent les légales (préavis, licenciement, congés payés) ainsi que d'éventuels dommages-intérêts.

Autre protection de la femme enceinte : on ne peut refuser son embauche à cause de sa grossesse. La grossesse n'est pas non plus une cause de renvoi pendant ou à la fin de sa période d'essai. Lors d'un entretien d'embauche, elle n'est pas tenue de dire qu'elle est enceinte.
Les femmes enceintes peuvent démissionner sans préavis, et sans avoir à payer d'indemnités de rupture anticipée, en cas de "grossesse apparente".

De même, un employeur n'a pas le droit de muter une salariée en raison de sa grossesse. Toutefois, si son état de santé médicalement constaté l'exige, elle peut être affectée temporairement à un autre poste de travail.
Si la décision vient de son patron, celui-ci doit obtenir l'accord du médecin du travail. Et il ne peut pas muter provisoirement la salariée dans un autre établissement sans son accord. La salariée qui demande à changer d'emploi doit fournir un certificat médical de son médecin. L'employeur peut refuser. En cas de désaccord, la décision du médecin du travail l'emportera.

En tout état de cause, la mutation provisoire ne doit entraîner aucune baisse de salaire. À la fin du congé, la salariée doit être réintégrée dans son emploi précédent.
Une femme enceinte ne peut faire l'objet d'aucune discrimination. Conséquence : pendant un entretien d'embauche, le futur employeur ne peut poser aucune question concernant une éventuelle grossesse.

De même, tout refus d'embauche ou toute rupture de la période d'essai motivés par l'état de grossesse de l'intéressée est sanctionné pénalement. Les salariées victimes d'une telle discrimination peuvent exiger des dommages-intérêts devant le conseil des prud'hommes.
En revanche, une femme en état de grossesse apparente peut démissionner de l'entreprise sans avoir à respecter un quelconque délai de préavis.

Sur production d'un certificat médical, une femme enceinte peut demander une mutation temporaire à un poste de travail moins pénible ou plus adapté à son état. En cas de refus de l'employeur, c'est le médecin du travail qui tranchera, la décision finale étant prise par l'inspection du travail.

La loi interdit de faire travailler une femme enceinte à l'extérieur après 22 heures ou quand la température est inférieure à 0°C. Il est de même interdit de leur faire porter des charges trop lourdes.
Pendant toute la durée de la grossesse, une salariée enceinte bénéficie d'autorisations d'absence pour effectuer les contrôles médicaux obligatoires. Ces absences sont considérées comme du temps de travail effectif. Certaines conventions collectives prévoient également des allégements d'horaires ou des temps de pause.

Une femme qui recherche un emploi est-elle tenue de révéler sa grossesse ? Non seulement elle n'est pas tenue de dire qu'elle est enceinte, mais l'employeur n'a pas le droit, lors de l'entretien d'embauche, de lui poser la question - oralement ou par écrit. Et il ne pourra pas non plus invoquer ultérieurement cette dissimulation pour la licencier pour cause réelle et sérieuse.

De son côté, le médecin du travail doit garder le secret professionnel s'il constate sa grossesse lors de la visite médicale d'embauche. Pendant la période d'essai, l'employeur ne peut pas se fonder sur la grossesse pour rompre le contrat de travail. En cas de litige, il doit communiquer au juge tous les éléments de nature à justifier sa décision. Le doute profite à la salariée.

  • III- Les obligations de la femme enceinte
Aucun texte de loi n'oblige une salariée à déclarer sa grossesse à une date précise. Toutefois, pour bénéficier des dispositions prévues pour les femmes enceintes, elle doit avertir son employeur de son absence et de la date à laquelle elle reprendra son travail.

Par contre, avant la fin de la 14ème semaine, il faut :
- faire la première visite médicale.
- déclarer la grossesse à la Sécurité Sociale (feuillet rose)- déclarer la grossesse à la CAF (2 feuillets bleus).





Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Kirill Zdorov - Fotolia.com

Auteur

ANTOINE Alain
Avocat Associé
Alain ANTOINE
SAINT-PAUL (974)
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