Taux d'intérêt légal

Prestation compensatoire et taux d'intérêt : La signification : préalable indispensable à l’application d’un taux d’intérêt majoré

Publié le : 09/02/2023 09 février févr. 02 2023

Toute condamnation à une indemnité emporte intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement en vertu de l'article 1231-7 du Code Civil. Ce taux, fixé semestriellement par arrêté du ministre de l'économie, est différent selon que le créancier agit à titre professionnel ou à titre particulier art L 313-2 C.M.F.
Pour les créances professionnelles, il est resté plus de 10 ans inférieur à 1 % (excepté en 2016) s'établissant même à 0.04 % en 2013 et 2014.

Ce taux peu incitatif au remboursement d'une dette est cependant majoré de 5 % à l'expiration d'un délai de 2 mois après que la décision soit devenue exécutoire, fut ce par provision L. 313-3 C.M.F. 

La décision exécutoire est définie par l'article 501 C.P.C. Il s'agit de la décision ayant force de chose jugée, c'est à dire insusceptible de recours suspensif d'exécution aux termes de l'article 500 C.P.C., mais remplissant également les conditions des articles 502 et 503 C.P.C. qui imposent l'apposition de la formule exécutoire et la notification de la décision.

C'est cette dernière condition qui faisait défaut en l'espèce (Cass. Civ. 2e, 12 jan. 2023, 20-20063).

Le divorce de M. R et Mme W avait été confirmé en appel et M. R condamné à 40.000 euros au titre d'une prestation compensatoire par arrêt du 23 septembre 2010.

M. R avait saisi le Juge de l'exécution en contestation des mesures d'exécution entreprises.

Ce dernier avait constaté que le divorce était devenu irrévocable le 23 septembre 2012 (vraisemblablement en application de l'article 528-1 C.P.C.) et avait retenu cette date comme date de majoration du taux de l'intérêt légal applicable à la condamnation.

Cependant l'arrêt n'avait été signifié que le 2 janvier 2018 et la majoration du taux d'intérêt ne pouvait donc intervenir qu'après le 2 mars 2018 conformément à l'article L 313-2 C.M.F.
La Cour de Cassation ne pouvait que censurer à ce titre la décision de la juridiction d'appel.

Cette décision s'inscrit fort logiquement dans une jurisprudence constante de la Cour suprême :
Cass. Civ. 3e, 3 juin 1992, no 90-16.792
Cass. Civ. 2e, 21 oct. 2004, n° 03-16.786

Chronologie de l'arrêt :

  • 7/09/2006 : Arrêt de condamnation à pension alimentaire de 380€ mensuels à compter du 28/11/2005
  • 10/2006 : Procédure de paiement direct
  • 2/03/2009 : Jugement prononçant le divorce : prestation complémentaire de 400 € viager par mois
  • 23/09/2010 : Arrêt confirmant divorce et condamnant à prestation complémentaire de 40.000 € en capital
  • 23/09/2012 : Divorce devenant irrévocable
  • 23/11/2012 : Date de majoration des intérêts selon le Jex et la Cour d'appel
  • 02/01/2018 : Signification de l'arrêt.
  • 23/08/2018 : Action devant le Jex contre Mme pour procédure abusive
  • 12/04/2019 : Jugement avant dire droit du Jex constatant que le divorce est irrévocable le 23/09/2012
  • 29/11/2019 : Jex rejetant l'exonération de majoration du taux d'intérêts
  • 07/07/2020 : Arrêt de confirmation du jugement du Jex.
  • 12/01/2023 : Cassation et fixation du point de départ de la majoration au 2/03/2018

Pour aller plus loin :

Décision de justice exécutoire immédiatement (exécution provisoire, ordonnance de référé, arrêt ...) :

Le délai de 2 mois court à partir de la date de la signification de la décision. Cass. Civ.2e, 4 avr. 2002, n° 00-19.822.
 
Mais l'exécution provisoire subordonnée à la fourniture d'une garantie qui n'a jamais été effectuée ne saurait permettre la majoration du taux d'intérêts Cass. Civ. 2e, 19 mai 1999, no 96-22.280
 
De même si l'exécution provisoire est suspendue
Cass. Com. 8 dec. 2009, n° 08-20.680
 
Par contre en cas d'arrêt d'appel confirmatif, le délai court du jour de la signification du jugement
Cass. Civ. 1re 18 dec. 1990, n° 88-18.700 
 

Décision de justice exécutoire après un délai suspensif (opposition ou appel) :

Le délai de 2 mois court à partir du jour d'expiration des voies de recours, en l'absence d'un tel recours
Le délai court à partir de la signification de l'arrêt confirmatif d'appel en cas de recours (Cass. Civ.1re, 4 nov. 2003, n° 02-15.713)
 
En cas de péremption de l'appel , le délai court de la signification de l'arrêt constatant la péremption
Cass. Civ.2e 11 sept. 2003, n° 01-14.216
 
En cas d'arrêt de cassation, c'est la signification de cet arrêt qui constitue le point de départ du délai.
Cass. Civ 2e 20 jan. 2011 n° 10-11.904


Cet article n'engage que son auteur.
 

Auteur

Hervé PIERSON
Commissaire de justice
Etude ACTA - PIERSON & Associés
METZ (57)
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