Grands-parents et droit de visite sur les petits enfants

Grands-parents et droit de visite sur les petits enfants

Publié le : 07/07/2010 07 juillet juil. 07 2010

Les relations intergénérationnelles sont à la fois un droit de l'enfant et un droit de ses grands-parents, que les parents doivent s'efforcer de respecter, sauf intérêt de l’enfant librement apprécié par le juge aux affaires familiales.Droit de visite des grands-parents sur les petits enfants


L’article 371-4 ,modifié par Loi n°2007-293 du 5 mars 2007 - art. 8 JORF 6 mars 2007 précise que :

« L'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à l'exercice de ce droit.
Si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non.
»

Le code civil s'aligne sur l'article 3 de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant qui énonce que :
« dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ».

Les relations intergénérationnelles sont à la fois un droit de l'enfant et un droit de ses grands-parents, que les parents doivent s'efforcer de respecter, sauf intérêt de l’enfant librement apprécié par le juge aux affaires familiales.
Si ce droit légitime, nécessaire à l'épanouissement de l'enfant et à la quiétude des ascendants n'est pas respecté, les grands-parents peuvent s'adresser au Tribunal de Grande Instance compétent (lieu de résidence des petits enfants).

Pour que la décision soit acceptée par tous les intéressés, sans heurts, sans conflits, le dialogue, la médiation familiale, doit être (si possible) une étape à privilégier avant de saisir le tribunal compétent qui, en définitive, tranchera et imposera sa décision aux parties.

Il est indispensable dans ce type de procédure, d'être conscient de l'impact d'un conflit entre parents et grands parents sur l'enfant qui est un être fragile et qui est donc à ménager des conflits des adultes qui l’entourent.
Au delà de ça, c'est un réel déchirement pour toute la famille qui pourra avoir des conséquences fâcheuses irréversibles.


La procédure

Le Juge aux Affaires Familiales dispose d'une compétence exclusive, même si le mineur fait l'objet d'un placement hors de son milieu familial (le juge des enfants ne peut statuer sur ces rapports).
Les débats ont lieu en Chambre du Conseil, donc non public, en vue de préserver les intérêts des parties concernées, le recours à un avocat est obligatoire .

Le dossier est communiqué au Ministère public.

Le juge aux affaires familiales tiendra compte dans l'examen du dossier de l'intérêt de l'enfant et examinera les points suivants, dont la liste n'est pas limitative :
• la pratique que les parents et grands-parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure,
• l'attachement de l'enfant envers ses grands-parents, et réciproquement,
• le résultat des enquêtes sociales, psychologiques éventuellement effectuées tenant compte notamment de l'âge de l'enfant, de son environnement,
• l'audition de l'enfant dans les conditions prévues à l'article 388-1 du Code Civil pour avoir son sentiment, audition qui ne lie pas le juge,
• très important la cause de la mésentente à l'origine de la procédure pour tenter de concilier les parties afin de les amener à de meilleurs sentiments dans l'intérêt de l'enfant, qui en aucune façon ne doit être l'objet de joute familiale, de déchirement, etc.

Le juge peut refuser aux grands-parents le droit de visite et d'hébergement de leurs petits-enfants si ce droit de visite est « contraire à l’intérêt de l’enfant »:


Qu’est-ce que « l’intérêt de l’enfant » ?

Il faut d’abord rappeler que jusque la loi du 5 mars 2007 on parlait également de « motifs graves », notion qui a été abandonnée.
En effet parler de « motifs graves » pouvait psychologiquement perturber l’enfant concerné et entraîner des séquelles , l’enfant comprenant mal les accusations portées entre ses ascendants.

C’est ainsi que le Législateur ne parle plus que de l’intérêt de l’enfant à avoir ou à ne pas avoir de relation personnelle avec ses grands-parents .

Cela permet au juge d’avoir une vision d’ensemble de la situation, et de procéder au cas par cas.

C’est ainsi qu’est refusé un droit de visite « dans l’intérêt de l’enfant » si :
• l'enfant lui-même refuse de voir ses grands-parents,
• les rapports entre les parents et les grands-parents sont très mauvais, exécrables et risquent de perturber l'enfant en le faisant évoluer dans un climat de crise, d'anxiété, néfaste pour lui,
• une rencontre entre l'enfant et ses grands-parents présente un caractère dangereux pour lui, par exemple grands-parents alcooliques, violents, ayant fait l'objet de peines d'emprisonnement, d'atteinte à la pudeur, etc.
• grands-parents manifestement inaptes à s'occuper et surveiller convenablement l'enfant, parce que atteint de maladies mentales, diminués physiquement, s’adonnant à la boisson….etc.
• grand-père ayant par exemple refusé d'associer la mère aux funérailles du père et ayant retiré des objets commémoratifs placés par les enfants sur la tombe de leur père, soupçon de spoliation ou de recel de succession….

Il est à préciser que rien n'oblige cependant le juge aux affaires familiales à fixer un droit d'hébergement : il peut ,en effet , se limiter à fixer un droit de visite ou même de correspondance, s'il l'estime largement suffisant dans l'intérêt de l'enfant dont il est le protecteur légal.

Textes :
Décret n°85-937 du 23 août 1985 - art. 23 (Ab)
Code de l'action sociale et des familles - art. R224-23 (V)
Nouveau code de procédure civile - art. 1180 (V)


Par exemple :
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 14 janvier 2009
N° de pourvoi: 08-11035
Publié au bulletin Rejet

M. Bargue, président
Mme Vassallo, conseiller rapporteur
M. Sarcelet, avocat général
SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat(s)
________________________________________

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Michel X... et son épouse, Mme Y..., font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2007) d'avoir accordé aux grands parents paternels un droit de visite sur leurs deux petits enfants, Roselyne et Romain, alors, selon le moyen :

1° / qu'en présence d'un conflit familial aigu, ancien et non résolu opposant les grands parents et les parents de l'enfant, l'intérêt de celui-ci est susceptible de faire obstacle dans ce contexte à des rencontres obligatoires avec les premiers organisées pour la mise en place d'un droit de visite ; qu'en l'espèce, il résultait des pièces de la procédure, notamment du rapport d'expertise, qu'un conflit familial profond et ancien, non résolu, opposait les grands parents à leur fils, l'expert ayant souligné la nécessité d'apaiser ce conflit avant d'envisager la possibilité d'un droit de visite des grands parents, de sorte qu'en se bornant à énoncer que la situation était susceptible d'évolution dans le temps et que les grands parents s'étaient engagés à ne pas dénigrer leur fils et leur belle fille auprès de leurs petits enfants, sans examiner si l'intérêt de ces derniers faisait obstacle à l'octroi d'un droit de visite des grands parents en l'état d'un conflit familial lourd et ancien qu'elle a d'ailleurs admis, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 371-4 du code civil ;

2° / que les fils et belle fille soulignaient, pièces à l'appui, que non seulement les intéressés procédaient à un dénigrement constant à leur égard, mais encore qu'ils se livraient " à un harcèlement méthodique, à la fois insidieux et violent ", notamment par " appels téléphoniques " et " recours à des détectives privés ", qu'ils n'avaient ainsi " aucun scrupule à leur nuire ", se montrant de la sorte " indifférents aux répercussions sur les petits enfants " ; qu'en délaissant ces conclusions d'où il ressortait que, en l'état d'un tel comportement des grands parents, l'intérêt des enfants faisait obstacle à l'octroi du droit de visite revendiqué, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé, à bon droit, que pour faire obstacle à l'exercice du droit d'un enfant à entretenir des relations personnelles avec ses ascendants, seul l'intérêt de l'enfant doit être pris en considération, c'est par une appréciation souveraine et une décision motivée que la cour d'appel a relevé, d'abord, qu'il résultait du rapport d'expertise médico-psychologique, d'une part que la démarche actuelle des grands parents ne constituait pas un geste de malveillance mais un désir inconscient de réparation, d'autre part qu'il apparaissait non seulement souhaitable mais nécessaire qu'à plus ou moins long terme les enfants puissent entretenir des relations avec leurs grands parents paternels, ensuite, qu'à l'audience, les grands-parents s'étaient engagés à ne pas dénigrer les parents, de sorte qu'il était dans l'intérêt des petits enfants de nouer progressivement des relations avec leurs grands parents paternels ; qu'en se déterminant ainsi en considération de l'intérêt des enfants, elle a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Michel X... et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille neuf.

Publication : Bulletin 2009, I, N° 2.


Sophie DEBAISIEUX-LATOUR



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Pétrouche - Fotolia.com

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