Succession de PSE (plan de sauvegarde de l'emploi) et différence de traitement

Succession de PSE (plan de sauvegarde de l'emploi) et différence de traitement

Publié le : 04/10/2017 04 octobre oct. 10 2017

Par deux arrêts du 29 juin 2017 la Cour de cassation tranche une question qui se posait régulièrement dans les opérations de restructuration : celle de l’opposabilité des mesures d’un plan de sauvegarde de l’emploi sur un plan suivant ou inversement. 

Dans le premier cas en effet un responsable de l’administration du personnel licencié dans le cadre d’un PSE mis en œuvre en 2009 demandait le bénéfice de l’indemnisation de celui qui avait suivi un an plus tard.

Il est toutefois plus fréquent que la question émerge à l’occasion de l’élaboration d’un nouveau plan : pour des raisons évidentes, les instances représentatives du personnel – dont les organisations syndicales, désormais en mesure de négocier un accord collectif incluant le plan – sont âpres à négocier des niveaux d’indemnisation toujours supérieurs d’une opération à l’autre et c’est souvent le montant des indemnités dites supra légales qui est au cœur des débats : jusqu’ici, il était plus ou moins admis que l’on ne peut pas « faire moins » après avoir fait mieux et les Directions d’entreprise elles-mêmes hésitaient souvent à repartir d’une page blanche.

Les décisions de la cour de cassation sont donc bienvenues en ce qu’elles rétablissent une lecture rigoureuse de la notion d’égalité de traitement, fondement juridique sur lesquels les demandeurs des deux affaires établissaient leurs prétentions.

Ce faisant la Cour s’en tient à appliquer strictement le principe de l’égalité de traitement qui veut que soient  traités de la même manière « tous les salariés placés dans une situation identique » (cass.soc. 29 octobre 1996 n° 92-43.680).

C’est précisément sur le contenu de cette notion que sont invalidées les deux décisions de cour d’appel qui avaient considéré, que l’identité s’excipait de mêmes « déception » et « traumatisme moral ». Pour les juges du fond, la nature de la situation en quelque sorte (être compris dans un licenciement collectif) suffisait à commander un traitement indifférencié : le ressenti était le facteur d’identité qui devait appeler l’unité de la réponse.

Pour autant, lesdits arrêts ne craignaient pas d’évoquer les éléments de différenciation des réorganisations considérées, dont une fermeture de site (contre de « nombreux licenciements ») pour affirmer, un peu vite, qu’« aucune raison objective et étrangère à une discrimination prohibée » n’était alléguée par les entreprises qui avaient le choix de différencier les mesures des plans successifs.

Mais c’était rester à un niveau d’appréciation évidemment trop large, puisqu’il existe autant de situations économiques différentes que de modalités de restructuration destinées à les résoudre. 

Du côté de la cause, l’appréciation juste des faits commande de se garder des apparences : le même site, appartenant à une filiale de grand groupe ou, après cession, étant le second établissement d’une entreprise familiale qui aura fait une modeste opération de croissance externe, pourra conserver la même localisation et la même activité mais la comparaison s’arrête là : comment, dans ces conditions, soutenir sérieusement que l’actionnaire familial devrait être tenu du niveau d’indemnisation de son prédécesseur, aux moyens éminemment supérieurs aux siens, à tous égards ?

Du côté de l’effet, le « ressenti » mis en avant par les juges du fond – et dénominateur commun aux salariés licenciés - n’apparaît finalement qu’une part infime de leur situation effective : car celle-ci dépendra largement plus de son âge, de son employabilité, de la situation économique du bassin d’emploi au jour du licenciement, des possibilités de repositionnement sur celui-ci etc…

Il ne saurait donc y avoir un droit acquis systématique, pour les salariés victimes d’un projet de licenciement collectif, à bénéficier des mesures du plan de sauvegarde de l’emploi antérieur, quel qu’ait pu être la générosité de son contenu.

Finalement, il en va ici comme en matière d’indemnisation de la rupture : la situation des intéressés s’apprécie, pour l’être justement, ici et maintenant.


 Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : ​© D-Plume - Fotolia.com
 

Auteur

CHANAL Danièle
Avocate Associée
Aguera Avocats
PARIS (75)
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