Faire rimer PME avec RSE, compte-rendu de la conférence "Quelles RSE pour les PME"

Publié le : 17/02/2013 17 février févr. 02 2013

A l'intersection du droit et de la finance, l'analyse de la RSE se pose avec une certaine nécessité et exige d'embrasser ses enjeux de manière pluridisciplinaire. Xavier FONTANET se livre à une analyse pragmatique de la RSE, véritable buzzword.

Faire de la RSE une stratégie, traité d'honnêteté à destination des entreprisesSous les ors de la Maison des Arts et Métiers, s'est tenu le 18 février dernier un petit-déjeuner débat animé par Monsieur Xavier FONTANET, chantre sans ménagement de la concurrence et de la mondialisation. Xavier FONTANET, lors d'une interview donnée à radio classique, a affirmé sans ambages :"l'Etat est devenu un jockey obèse qui engueule son cheval", affirmation largement reprise depuis lors. Il serait cependant réducteur de résumer Xavier FONTANET à ces seuls mots. Ce professeur à HEC aujourd'hui retraité "bât le fer alors qu'il est encore chaud" et prêche son savoir-faire aux jeunes générations dans un souci bien compris de transmission cognitive. Loin de livrer une logorrhée éthérée, Xavier FONTANET prend le parti de donner la préséance aux exemples concrets en lieu et place de concepts théoriques dont la matérialité est difficilement saisissable.

Après avoir présenté les enjeux du Master Ethique et Droit des Affaires, Roxana Family, qui en est la codirectrice, a posé la question de savoir s'il était possible de transposer les expériences fructueuses des grandes entreprises sans coup férir aux petites entreprises en matière de RSE. Roxana Family part du constat que la RSE fait aujourd'hui partie intégrante de la stratégie des entreprises et se place à la congruence du droit et de la finance.

Après une brève introduction, Roxana Family souligne qu'il est de plus en plus difficile de savoir si la RSE repose toujours sur la base du sacrosaint volontariat ou si elle est devenue in fine obligatoire.

Xavier FONTANET, diplômé de Ponts et Chaussées et du MIT, va alors soulever quatre points afin de susciter la réaction de son auditoire.

1. Une aversion bien comprise pour le distinguo TPE/PME:

Le professeur à HEC souligne que le distinguo TPE / PME ne lui sied guère dans notre économie de marché mondialisée. Le socle commun des entreprises à ses yeux peut être résumée d'un mot: c'est la concurrence. L'internationalisation actuelle a mis à néant toute opposition entre TPE et PME qui serait par trop manichéenne.

2. Le développement durable sera naturel ou ne sera pas:

Xavier FONTANET nourrit une certaine méfiance à l'endroit du développement durable. D'après ses propres mots, il est important de faire du développement durable de manière naturelle et de se focaliser sur la fidélisation de la clientèle qui est cardinale. Car derrière la fidélisation de manière sous-jacente apparaît l'intérêt général qui est le leitmotiv.

3. "Une bonne vente bien faite est mieux qu'un don"?

C'est de cet aphorisme contre-intuitif que Xavier FONTANET part afin de donner plusieurs exemples saillants de sa propre expérience qui n'ont pas manqué de marquer les esprits de son auditoire.

L'un des membres de sa famille lui a un jour fait part de son scepticisme quant au succès des caravanes Essilor qui parcouraient l'Afrique afin de donner des lunettes aux populations. Il avait été le témoin d'un pugilat entre deux hommes dont l'un voulait vendre au second une paire de lunettes qu'on lui avait donné, une fois la paire de lunettes acquise cette dernière n'était évidemment pas à la vue de l'acquéreur à son plus grand dam.

L'ancien PDG d'Essilor donne un second exemple tout aussi éloquent qui se déroula quant à lui en Inde. Une femme se présente dans un magasin Essilor les pieds endoloris et ensanglantés. Les commerciaux contactent de céans le siège afin d'offrir gracieusement des lunettes à la jeune femme. Cette dernière refuse et insiste de manière catégorique pour payer car il en allait de sa dignité. Dernier exemple enfin, aux lendemains du tsunami, Essilor décide de collecter des fonds et de les donner à la petite ville de Madras. Le maire de ladite ville refuse de manière péremptoire.

Essilor a pris acte de la connotation péjorative du don et a adapté sa stratégie en conséquence. Une initiative depuis récompensée a vu le jour en Inde. Des caravanes Essilor sont déployées dans les villes, des enveloppes de 5 dollars sont données aux habitants de la plus grande démocratie du monde qui achètent ensuite des lunettes auprès des caravanes.

4. Pourquoi un tel dénigrement hexagonal à l'endroit des grandes entreprises?

Nous sommes un pays qui regorge de leaders mondiaux mais selon l'ancien PDG d'Essilor les français sont très négatifs à l'endroit des grandes sociétés internationalisées.

⇔ Interrogé par Roxana FAMILY il argue que la RSE est une nécessité. Selon lui, les jeunes générations ont joué ici un rôle d'importance. Les jeunes générations aujourd'hui sont en quête de sens. Il souligne que le PDG se doit avant toute chose d'être un profond humaniste qui suit l'évolution d'un parcours des prémisses au sommet. Cependant, Xavier FONTANET est réticent à toute législation intrusive. La RSE doit venir du coeur, être intègre et naturelle elle est une nécessité et ne se conçoit pas en termes obligatoires. A ses yeux, il est préférable qu'une bonne pratique précède la norme.

Xavier FONTANET estime qu'il est regrettable que le système français soit si bureaucratisé, la myriade de papiers obligatoires est chronophage et préjudiciable. La RSE ne doit pas se résumer à une addition de papiers au millefeuille existant. Beaucoup de sociétés font de la RSE sans le dire à la façon de Monsieur Jourdain.

Les incuries de la RSE: de l'impossible moralisation du consommateur?

La principale limite de la RSE réside dans l'image d'Epinal du consommateur moral qui procède à un achat responsable. Tant que le consommateur moral n'existera pas, la RSE sera amputée d'un de ses membres. Il faut veiller avec la RSE à ne pas dédouaner le consommateur de ses responsabilités. Si le consommateur se focalise sur l'achat de produits à moindre coût il ne peut ensuite guère s'étonner du phénomène de la délocalisation. Au contraire, s'il achète du Made in France, il acte les volets de la RSE et se moralise en conséquence.

Un conseil avisé à l'adresse des PME: le mariage pour tous

La préconisation de l'ex PDG d'Essilor aux PME? Il exhorte ses dernières à se marier avec d'autres entreprises. La clairvoyance est le maître mot, il faut se rapprocher d'autres entreprises avant de se faire acheter et avoir ainsi un coup d'avance.

"On ne peut commander sans avoir obéit" (De Gaulle): propos sur la féminisation des Conseils d'administration

Xavier FONTANET aurait sûrement été contre la législation norvégienne qui imposait aux grandes entreprises d'avoir 50% de femmes au sein de leur Conseil d'Administration. "Se hâter lentement" tel est l'état d'esprit de Xavier FONTANET sur la féminisation des conseils d'administration d'entreprises. Il est favorable à la composition d'un conseil d'administration à hauteur de 50% de femmes à condition de patienter une décennie de plus car selon lui l'expérience peut encore faire défaut.

Xavier FONTANET clôt ses réflexions par cette phrase pleine d'esprit : il faut traiter les autres comme nous souhaiterions être traité.

Des mots riches d'enseignement quant à la gouvernance et à la stratégie des entreprises d'aujourd'hui afin de recouvrer la sacrosainte croissance avec pour étendard l'honnêteté.



RAMA Chloé, Eurojuris France





Cet article n'engage que son auteur.

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