Des circonstances de validation du système des dates de valeur en matière de chèque

Des circonstances de validation du système des dates de valeur en matière de chèque

Publié le : 10/01/2012 10 janvier janv. 01 2012

La pratique bancaire des dates de valeur qui a essentiellement pour origine, le décalage entre deux événements, a suscité de longs débats.

Chèque et date de valeurCass. com, 25 octobre 2011 (pourvoi n° 10-23.397)

La pratique bancaire des dates de valeur qui a essentiellement pour origine, le décalage entre deux événements, à savoir la date de l'opération que l'on dira "comptable" de débit ou de crédit sur un compte et la date d'absence (pour un débit) ou de présence (pour un crédit) des fonds sur ledit compte, a suscité de longs débats.

Ces débats avaient trouvé leur plus vaste réponse dans les jugements rendus par le Tribunal de Grande Instance de Paris, le 18 mai 2004 (v. notamment Dalloz 2004. J. 2288) puis dans la Loi 2009-1255 du 19 octobre 2009 "tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et des moyennes entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers".

Il en est notamment issu que la date de valeur d'une opération de paiement par chèque libellée en euros ne peut plus désormais "différer de plus d'un jour ouvré de la date retenue pour sa comptabilisation sur un compte de dépôts" (art. L. 131-1-1 du Code Monétaire et Financier).

Toutefois, au regard du principe de réalité qui gouverne la matière, la pratique des dates de valeur en matière de chèque peut retrouver une certaine et logique liberté pour les paiements entre transnationaux autrement dit "hors place".

Tel est l'objet de l'arrêt de la Chambre commerciale du 25 octobre 2011.

Un client français remet à sa banque à l'encaissement un chèque tiré sur un établissement étranger (irlandais).
Ce chèque déposé le 11 septembre 2004, a été immédiatement crédité au compte du remettant avec une date de valeur au 22 septembre 2004.
L'opération de base (vente de véhicule) ayant a été annulée à la demande de l'acheteur (domicilié à Londres), le vendeur français le rembourse.
Le 30 septembre suivant, la banque française du vendeur l'informe du rejet du chèque déposé le 11 septembre et procède à sa contrepassation.

Le client vendeur reprochera à sa banque de lui avoir faussement fait croire à l'encaissement du chèque et sollicitera des dommages et intérêts d'un montant équivalent aux sommes devant être remboursées à ladite banque.

Confirmant les juges du fond, le Juge de cassation retient des moyens qui ne souffrent d'aucune critique et qui méritent d'être ici rappelés à savoir que :

- l'indication d'une date de valeur a pour objet de déterminer le montant des agios éventuellement dus par un client qui utiliserait le concours résultant de l'inscription immédiate de leur montant au crédit du compte ;
- en l'absence de faute de sa part, une banque a le droit de se faire rembourser l'avance ainsi consentie ;
- la convention d'ouverture de compte stipulait clairement que les chèque remis à l'encaissement seraient immédiatement crédités au compte, sous réserve d'encaissement et que pour les chèques en euros tirés sur l'étranger, la date de valeur serait de 15 jours francs ;
- enfin, le bordereau de remise portait au surplus avec la date de valeur la mention "crédit immédiat sauf bonne fin".

Voici pour la partie proprement bancaire de la problématique. Quant à celle concernant la responsabilité, la Cour de cassation précise que le client vendeur :

- rompu aux pratiques bancaires en matière de trésorerie en sa qualité de chef d'entreprise ;
- celui-ci ne pouvait légitimement croire que le chèque avait été effectivement encaissé au vu de la mention de la date de valeur du 22 septembre 2004 figurant sur le relevé de compte.

Cette dernière incise en matière de responsabilité qui pourrait passer pour de l'évidence nous semble cependant quelque peu troublante en ce qu'elle introduit une dose d'incertitude (de subjectivité) dans le bien fondé (en objectivité) du moyen précèdent propre au droit bancaire.

En effet, la solution finalement retenue aurait-elle été la même si le client n'était pas "rompu aux pratiques bancaires" ? La responsabilité de la Banque aurait-elle été alors retenue, ce malgré la clarté des mentions sises dans les conditions contractuelles ?

Au lieu de tarir le présent contentieux, cet arrêt permet au contraire sa poursuite, ce qui est regrettable pour la sécurité des relations contractuelles.



L'auteur de cet article:Stéphane ASENCIO, avocat à Bordeaux



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : Cass. com, 25 octobre 2011 (pourvoi n° 10-23.397) © Kromosphere - Fotolia.com

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