Relation distributeur / fournisseur : limites – notion de déséquilibre significatif

Relation distributeur / fournisseur : limites – notion de déséquilibre significatif

Publié le : 24/02/2014 24 février févr. 02 2014

Par un arrêt en date du 18 décembre 2013, la Cour d’Appel de PARIS a rendu une décision intéressante dans le cadre des relations fournisseur/distributeur.

Relations entre distributeur et fournisseur Par un arrêt en date du 18 décembre 2013 (n°12-00150), la Cour d’Appel de PARIS (Pole 5, Chambre 4) qui est désormais seule compétente en la matière en tant que juridiction d’appel, a rendu une décision intéressante dans le cadre des relations fournisseur/distributeur en condamnant une grande enseigne de la distribution à une amende de 500.000 €, sur le fondement de l’article L142-6.2 du Code de Commerce, qui prévoit qu’engage sa responsabilité celui qui soumet ou tente de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

En l’espèce, la Cour a examiné les contrats cadres annuels liant ce distributeur à ses fournisseurs et a notamment considéré qu’il y avait déséquilibre significatif, au vu des éléments suivants :

  • Exclusion des conditions générales de vente du fournisseur au profit des conditions d’achat du distributeur. Ces conditions d’achat étaient établies à partir d’un modèle type et le distributeur ne démontrait pas qu’elles étaient négociées et donc ne constituaient par un socle de la négociation commerciale telle que prévue par l’article L441-6 du Code de Commerce.
  • Les conditions de règlement : distorsion entre la date de règlement des factures de service de coopération commerciale (30 jours) par rapport au paiement des marchandises au fournisseur qui elles étaient à 30, 45, 50 ou 60 jours. Cette pratique avait déjà été sanctionnée par un arrêt de la Cour d’Appel de PARIS du 30 novembre 2013 (n°12-04791).
  • Absence d’escompte pour le paiement anticipé des ristournes et des prestations de service outre l’existence d’une clause pénale abusive en cas de non respect des délais pour le paiement des ristournes et des prestations de service.
  • Retour des produits dégradés par la clientèle : il était prévu que les frais liés à la reprise ou la destruction de ces produits étaient à la charge du fournisseur. La Cour a estimé qu’il s’agissait d’un transfert au fournisseur des risques inhérents à la mise en vente du produit dont les modalités ressortaient du distributeur.
  • Pénalités pour le non paiement des ristournes et des prestations de service (3 fois le taux de l’intérêt légal plus pénalité de 160 € par facture de prestation de service) outre les pénalités en matière de logistique d’approvisionnement et d’information du distributeur. Par contre, les manquements du distributeur n’étaient pas sanctionnés par des pénalités.
Sans rejeter le principe des clauses pénales destinées à assurer la bonne exécution des prestations, la Cour a cependant retenu qu’en l’espèce, en l’absence de pénalités en cas d’inexécution par le distributeur de ses obligations en matière de service, la coopération commerciale entraine un déséquilibre significatif.

Ainsi on voit bien à travers cet arrêt le rôle de plus en plus important tenu par le Juge dans le contrôle des relations commerciales établies, tant dans le domaine de la rupture des relations commerciales (art L442-6.1 cf. arrêt de la Cour d’Appel de PARIS Pole 5 Chambre 5 du 12.09.2013 (n°11/22934) que ce qui est plus récent, dans la notion de déséquilibre significatif.

La compétence unique de la Cour d’Appel de PARIS dans ce domaine en tant que juridiction d’appel et la limitation des tribunaux de commerce pouvant connaitre de ce litige va permettre de dégager une jurisprudence cohérente en la matière, la Cour d’Appel ayant d’ailleurs admis dans un arrêt du 4 juillet 2013 (n°12/076515) que le déséquilibre entre les parties instauré par une clause peut être corrigé par l’effet d’une autre à condition que le rééquilibrage invoqué soit démontré et admis par le Juge.

Cette décision semble d’autant plus intéressante qu’elle intervient au moment où a été présenté au parlement le projet de loi HAMON qui prévoit d’ailleurs certaines dispositions dans les relations entre distributeur et fournisseur, notamment la négociation des conditions générales de vente sans que le distributeur puisse opposer ses conditions générales d’achat, outre les dispositions de la loi concernant les consommateurs.





Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Mimi Potter - Fotolia.com

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