Protection environnement

La protection de l’environnement, patrimoine commun des êtres humains, est un objectif de valeur constitutionnelle

Publié le : 11/02/2020 11 février févr. 02 2020



 

Le 7 novembre 2019, le Conseil d’Etat a saisi le Conseil Constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité. La question était de savoir si l’interdiction de la production, le stockage et la circulation en France de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par l’Union européenne est contraire à la liberté d’entreprendre. 
Le Conseil Constitutionnel a jugé en des termes inédits que « la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitue un objectif de valeur constitutionnelle ». 

Le fait de privilégier la protection de la santé humaine et de l’environnement à la liberté d’entreprendre n’est pas contraire à la Constitution

Plus précisément, l’article L.253-8 du code rural et de la pêche dans sa version du 30 octobre 2018 mentionne que : 

« IV. Sont interdits à compter du 1er janvier 2022 la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l'environnement conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précitée, sous réserve du respect des règles de l'Organisation mondiale du commerce ».

Ce paragraphe IV de l’article L.253-8 du code rural et de la pêche fait obstacle à ce que des entreprises établies en France participent à la vente de ces produits dans le monde sans se soucier des atteintes susceptibles d’affecter la santé humaine et environnementale.  

En d’autres termes, est interdit la production, le stockage et la circulation en France de produits phytopharmaceutiques (herbicides, fongicides, insecticides, acaricides) contenant des substances actives non approuvées par l’Union européenne, en raison de leurs effets sur la santé humaine, animale et environnementale. 

L’union des industries de la protection des plantes et l’union française des semenciers estiment que l’interdiction d’exportation de ces produits était pour les entreprises productrices ou exportatrices contraire à leur liberté d’entreprendre

L’interdiction posée par la loi étant selon elles manifestement disproportionnée puisque dépourvue de lien avec l’objectif de protection de l’environnement et de la santé. 

Les requérantes font valoir que bien que la production, le stockage et l’export de ces produits soient interdits sur le sol français, cela n’empêche en rien à d’autres de s’approvisionner dans d’autres pays. 

Les sages ont jugé que « la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitue un objectif de valeur constitutionnelle ». 

Sa décision se fonde à cet égard explicitement sur les termes du préambule de la Charte, selon lesquels « l'avenir et l'existence même de l'humanité sont indissociables de son milieu naturel … l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains… la préservation de l'environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation … afin d'assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins ».

Le Conseil Constitutionnel réaffirme qu’il appartient au législateur de prévenir les atteintes à la santé humaine, animale et environnementale qui pourraient résulter de la diffusion de produits dont la nocivité a été constatée par l’Union européenne. 

En conséquence, l’atteinte portée à la liberté d’entreprendre justifiée par la protection de l’environnement et de la santé tous deux objectifs à valeur constitutionnel.

Par ailleurs, l’interdiction de production, stockage ou circulation de produits phytopharmaceutiques contenants des substances actives non approuvées n’entrera en vigueur qu’au 1er janvier 2022 ce qui laisse aux entreprises un délai de trois ans pour s’adapter aux conséquences pour leur activité. 

Le Conseil constitutionnel conclut que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre la liberté d'entreprendre et les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement et de la santé.

Les dispositions contestées sont ainsi déclarées conformes à la Constitution.

Décision n°2019-823 QPC du 31 janvier 2020 


Cet article n'engage que son auteur.
 

Auteur

Capucine VARRON CHARRIER
Avocate Associée
CLAMENCE AVOCATS, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
TOULON (83)
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