Liquidation judiciaire: certains actifs peuvent être vendus à l’amiable mais à un prix réel

Liquidation judiciaire: certains actifs peuvent être vendus à l’amiable mais à un prix réel

Publié le : 05/11/2014 05 novembre nov. 11 2014

Alors que l'année 2013 a été marquée par plus de 55 000 procédures collectives, la Cour de cassation sécurise un peu plus les conditions dans lesquelles certains actifs peuvent être vendus à l'amiable dans le cadre d'une liquidation judiciaire.Cass. com. 8 juillet 2014 n° 13-19.395, Sté Touraine immobilier c/ Breion ès qual

Rappelons tout d'abord qu'en vertu de l'article L. 642-19 du Code de commerce, le juge commissaire peut autoriser la vente de gré à gré des biens du débiteurs en marge de la procédure classique de vente aux enchères publiques.

Lorsque qu'il autorise une telle vente à l'amiable, le juge commissaire doit déterminer le prix et les conditions de la vente et peut demander que le projet de vente amiable lui soit soumis afin de vérifier si les conditions qu'il a fixées ont été respectées.

C'est à propos des conditions de fixation de ce prix de vente amiable que la Cour de cassation vient d'apporter une précision notable.

La vente d'un fichier clientèle au prix de 2 500 € ?

Dans la présente affaire, une ordonnance du juge commissaire avait autorisé pour un prix de seulement 2 500 €, la cession de gré à gré du fichier clientèle d'une agence immobilière qui avait été mise en liquidation judiciaire.

Ce prix, qui avait été proposé par l'unique cessionnaire intéressé, avait été accepté par le juge commissaire au vu de la situation particulière de l'agence immobilière et notamment compte tenu de ce que :


  • plusieurs mandats de gestion locative ou de copropriétés de l'agence immobilière avaient été transférés à une autre agence,
  • le registre des mandats n'était pas fourni par l'agence immobilière,
  • en l'absence de toute garantie sur la consistance du fichier clientèle, une seule offre d'acquisition avait été reçue, le cessionnaire faisant son affaire personnelle de la reconstitution des dossiers, pointage des comptes et du paiement des loyers, charges et honoraires encore dus.
L'agence immobilière objet de la procédure collective contestait ce prix qu'elle estimait manifestement trop bas et interjeta appel de l'ordonnance du juge commissaire.

Elle fut déboutée par la Cour d'appel d'Orléans et porta l'affaire devant la Cour de cassation.


Précision sur la recevabilité du pourvoi en matière de vente des biens du débiteur

Saisi d'un premier moyen d'irrecevabilité soulevé par le liquidateur judiciaire, la Cour de cassation rappelle tout d'abord que depuis l'ordonne du 18 décembre 2008 et le décret du 12 février 2009, le pourvoi en cassation contre l'arrêt statuant sur une ordonnance du juge commissaire autorisant la vente de bien du débiteur n'est plus seulement réservé au ministère public et à la justification d'un excès de pouvoir.


Le prix de vente doit être le prix réel

Sur le fond, après avoir rappelé les motifs retenus par le juge commissaire pour autoriser la vente amiable à un prix effectivement bas, la Cour de cassation valide l'analyse du juge commissaire et de la Cour d'appel en précisant que le prix réel de la cession du fichier a pu valablement être fixé à la somme de 2 500 €.

Tout l'intérêt de cet arrêt réside dans cette référence à la notion de prix réel qui est à première analyse empruntée du droit commun de la vente et de la notion de prix réel et sérieux.

Ici, le caractère réel du prix ne se limite toutefois pas seulement à la question de savoir s'il existe ou non une contre lettre mais, au-delà, à la question de savoir si le prix retenu correspond bien à la valeur marchande et effective du bien.

En employant ce terme, déjà évoqué dans un arrêt du 28 septembre 2004, la Cour de cassation entend manifestement renforcer les garanties qui encadrent la cession de gré à gré en matière de liquidation judiciaire.

(Cass. Com, 28 Sept. 2004, n° 02-11.2010)

La vente à l'amiable présente un effet en matière de liquidation judiciaire un risque non négligeable pour les créanciers de l'entreprise objet de la liquidation judiciaire.

Ce risque est de voir une réalisation de l'actif sans rapport avec la véritable valeur des biens du débiteur.

On ne saurait en effet ignorer les pratiques de prédation provenant très souvent d'anciens concurrents et consistant à proposer, à des prix dérisoires, le rachat de gré à gré du peu d'actif restant, souvent constitué d'un stock ou d'un fichier de clientèle.

Ainsi en imposant que la vente de gré à gré soit faite à un prix réel, c'est à dire correspondant à la véritable "valeur marchande" de l'actif, la Cour de cassation offre une garantie supplémentaire en matière de réalisation d'actifs de la liquidation judiciaire.


Le juge commissaire ne peut autoriser la vente amiable d'un bien du débiteur placé en liquidation judiciaire qu'au prix réel de ce bien.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Robert Kneschke - Fotolia.com

Auteur

ROUSSE Christian

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