Un employeur peut-il consulter les informations diffusées par un salarié sur le compte privé d'un réseau social ?

Un employeur peut-il consulter les informations diffusées par un salarié sur le compte privé d'un réseau social ?

Publié le : 02/05/2018 02 mai mai 05 2018

La Cour de cassation dans un arrêt du 20 décembre 2017, estime qu’un employeur a porté atteinte à la vie privée d’une salariée en accédant à son compte Facebook via le téléphone professionnel de l’un de ses « amis ».

Les faits étaient les suivants.

Face au manquement de sa direction à diverses de ses obligations (non-paiement d’heures supplémentaires, prime non versée…), la salariée d’un restaurant décide de prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur.

S’opposant aux conditions de la rupture, ce dernier va notamment produire, par Procès verbal d’huissier, des informations extraites du compte Facebook de la salariée obtenues au moyen du téléphone portable d’un de ses collègues autorisé, lui, à consulter le compte.

Dans un premier temps, La cour d’appel d’Aix en Provence condamne l’employeur pour atteinte disproportionnée et déloyale à la vie privée de la salariée.

Selon elle, il n’est pas nécessaire de vérifier si les informations extraites du compte Facebook ont été identifiées comme personnelles ou non, ni de faire apparaître en quoi le fait d’y accéder porte atteinte à la vie privée du salarié. Le seul fait pour l’employeur de n’avoir pas été personnellement autorisé à y accéder suffit à écarter ces preuves du débat. Peu importe par ailleurs que les informations aient été recueillies à partir d’un téléphone professionnel. Ce mode de preuve n'étant pas recevable.

Pour l’employeur, cette décision ne se justifie aucunement. Il prétend au contraire qu’à défaut d’avoir été identifiées comme étant personnelles, les informations qu’il a pu recueillir au moyen du téléphone mis  à la disposition d’un salarié pour les besoins de son travail, sont présumées avoir un caractère professionnel. Elles constituent donc un mode de preuve licite. Il saisit la Cour de cassation.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel en indiquant que : «  le PV d’huissier établi le 28 mars 2012  à la demande de la société rapportait des informations extraites du compte Facebook de la salariée obtenues à partir du téléphone portable d’un autre salarié, informations réservées aux personnes autorisées. Aussi l’employeur ne pouvait donc pas y accéder sans porter une atteinte disproportionnée et déloyale à la vie privée du salarié ».

En d’autres termes, un employeur ne peut pas accéder aux informations extraites d’un compte Facebook de l’un de ses salariés sans y avoir été autorisé.

Si la solution dégagée va plutôt dans le sens de la protection de la vie privée et de la liberté des salariés, il n’en demeure pas moins que l’utilisation des réseaux sociaux présente toujours un risque.

Il convient bien de distinguer les conversations privées qui se tiennent via la messagerie Facebook (et qui sont privées) de celles qui se tiennent sur le « mur » et qui sont potentiellement ouvertes à un public plus large. Des propos tenus sur un compte trop ouvert pourraient être considérés comme étant publics et entraîner une condamnation de l’utilisateur pour délit d’injures publiques. Tout dépendra finalement des paramètres de confidentialité mis en place par le propriétaire du compte.


Cet article n'engage que son auteur.


Crédit photo : © Andrzej Puchta - Fotolia.com

 

Auteur

Christophe Delahousse
Avocat
Cabinet Chuffart Delahousse, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
ARRAS (62)
Voir l'auteur Contacter l'auteur Tous les articles de l'auteur Site de l'auteur

Historique

<< < ... 29 30 31 32 33 34 35 ... > >>
Navigateur non pris en charge

Le navigateur Internet Explorer que vous utilisez actuellement ne permet pas d'afficher ce site web correctement.

Nous vous conseillons de télécharger et d'utiliser un navigateur plus récent et sûr tel que Google Chrome, Microsoft Edge, Mozilla Firefox, ou Safari (pour Mac) par exemple.
OK