Caducité d'une autorisation pour une installation classée pour la protection de l'environnement

Caducité d'une autorisation pour une installation classée pour la protection de l'environnement

Publié le : 27/02/2012 27 février févr. 02 2012

La Cour d'Appel analyse strictement les dispositions de l'article R512-38 et rappele que la mise en service de l'exploitation s'entend bien évidement de la construction des ouvrages.

Notion de Caducité d'une autorisation pour une installation classée pour la protection de l'environnementL'article R512-38 du Code de l'Environnement, codification à droit constant de l'article 24 du Décret du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi N°76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement dispose que l'arrêté d'autorisation cesse de produire effet lorsque l'installation classée n'a pas été mise en service dans le délai de 3 ans ou n'a pas été exploitée durant 2 années consécutives sauf cas de force majeure.

Qu'en est-il lorsque, bénéficiant d'une autorisation, un exploitant va débuter la construction des ouvrages nécessaires à l'exploitation ?

En d'autres termes, faut-il considérer que la mise en service s'entend du début effectif d'exploitation ou peut-on faire remonter cette notion de mise en service au début de la construction de l'ouvrage ?


Le Conseil d'Etat a été appelé à se prononcer sur une partie de cette question dans un arrêt du 27 septembre 2006.
Il a rappelé que, outre le cas ou des travaux seraient entrepris dans le seul but d'échapper à la caducité, seul un défaut total d'exploitation est de nature à emporter la caducité d'une autorisation d'exploiter l'installation classée.
Dans cette décision de 2006, le Conseil d'Etat est donc venu rappeler que l'exploitation partielle d'une installation classée pour la protection de l'environnement permet de lutter contre une forme de caducité.

Il ne répondait pas à la question posée de la mise en service, question qui dans cet arrêt ne lui était d'ailleurs pas posée.

La jurisprudence rendue en la matière illustre la volonté du juge administratif d'analyser de manière très stricte cette notion de caducité.

Ce sont trois arrêts émanant de la Cour Administrative d'Appel de Lyon d'une part et de la Cour Administrative d'Appel de Paris d'autre part.

Dans un arrêt du 8 décembre 2009, la Cour Administrative d'Appel de Lyon, statuant sur les conditions d'exploitation d'une carrière est venue rappeler le considérant de principe selon lequel seul un défaut total d'exploitation est de nature à emporter la caducité d'une autorisation d'exploiter une installation classée.

Sur ce considérant de principe, la Cour analyse par la suite les éléments factuels qui permettent de démontrer que l'exploitation n'a en réalité pas cessé.
Ce sont des indices que la Cour va réunir pour démontrer que l'exploitation n'a en réalité jamais cessé et que la péremption n'est pas démontrée.

La Cour fait état notamment des déclarations d'activités annuelles mentionnées par l'exploitant. Dans un arrêt du 16 mars 2010, cette même Cour Administrative d'Appel de Lyon revient sur ce considérant de principe mais l'analyse à la lumière d'un autre point qui est le fait imputable à l'administration.

Elle rappelle en effet que les dispositions de l'article R512-38 du Code de l'Environnement ne peuvent recevoir application que si le défaut de mise en service de l'installation ou d'exploitation n'est pas imputable au fait de l'administration.

Elle prend une position de bon sens qui veut que, si l'administration empêche l'exploitation, elle ne peut évidemment pas invoquer la caducité de l'autorisation à l'issue du délai.

Dans le cas particulier qui occupait la Cour, il était question de décharges exploitées, faisant l'objet d'une très vive opposition.

Le préfet avait dans les circonstances particulières de cette espèce demandé que cesse l'exploitation et que plus aucun déchet ne soit déposé dans l'attente de l'intervention de l'arrêt de la Cour d'Appel de Lyon.
Et cette dernière rappelle que ces demandes réitérées du Préfet ont constitué un fait de l'administration de nature à interrompre le délai de caducité de l'autorisation.

Cette position parfaitement logique est très clairement explicitée dans cet arrêt du 16 mars 2010.

Enfin, par un arrêt du 29 septembre 2011, la Cour Administrative d'Appel de Paris est venue statuer sur une autre facette de l'application de l'article R512-38.

S'agissant plus particulièrement de la mise en service, elle a rappelé que les dispositions de l'article R512-38 ne pouvaient s'appliquer que si seul un défaut total d'exploitation était constaté.

Ce considérant de principe est rappelé de manière constante par la jurisprudence depuis 2006.

Et, s'agissant de la construction des ouvrages, elle vient démontrer qu'il résulte de l'instruction qu'au terme du délai de deux ans à compter de la publication de la décision d'autorisation, la société en cause avait quasiment achevé la construction des ouvrages.

Elle rappelle que dans ces conditions, et il s'agissait d'une centrale électrique, celle-ci devait être regardé comme ayant fait l'objet d'une mise en service aux sens des dispositions de l'article R512-38 et qu'il était donc sans incidence à ce sujet que les ouvrages n'aient pas fait l'objet d'une réception au terme du délai ni même que ces ouvrages respectent totalement les prescriptions de l'arrêté portant autorisation.

La Cour d'Appel de Paris vient donc de manière très claire analyser strictement les dispositions de l'article R512-38 et rappeler que la mise en service de l'exploitation s'entend bien évidement de la construction des ouvrages.
Cette position, là encore parfaitement logique, permet de préserver de toutes formes de caducité les autorisations d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement.

Dans ces hypothèses spécialisées de droit de l'environnement et de droit public le recours à un avocat spécialisé lui aussi est plus que jamais nécessaire.

Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © Beboy - Fotolia.com

Auteur

DROUINEAU Thomas
Avocat
1927 AVOCATS - Poitiers
POITIERS (86)
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