Bail commercial - procédure de résiliation - contestations sérieuses (non)

Bail commercial - procédure de résiliation - contestations sérieuses (non)

Publié le : 04/02/2015 04 février févr. 02 2015

Le commerçant louant votre local ne vous paye plus. Après avoir patienté trop longtemps, vous décidez qu'il est temps de prendre des mesures efficaces et vous engagez une procédure d'expulsion.L'huissier délivre un commandement de payer mentionnant la clause du bail prévoyant la résiliation de celui-ci en cas de non-paiement. Votre locataire ne bouge pas et le délai d'un mois s'écoule. Vous saisissez le juge des référés pour qu'il constate la résiliation du bail. Vous serrez cependant les fesses, car vous savez que le juge peut ne pas constater la résiliation, mais accorder des délais de paiement.


Et oh surprise ! Votre locataire ne demande pas des délais, mais soulève plusieurs difficultés qu'il considère comme sérieuses pouvant remettre en cause le montant des loyers dus. Par exemple, il soutient en vrac : que la clause d'indexation contenue dans le bail devrait être considérée comme non écrite (là il a raison…), que les charges qui lui sont réclamées ne sont pas justifiées, qu'il n'a pas accès à deux locaux annexes qui lui seraient loués.


Et sur ces contestations qu'il considère comme sérieuses, et l'une d'entre elles l'est véritablement, il demande au juge des référés de se dire incompétent.


S'il obtient gain de cause, vous risquez, dans le meilleur des cas, de vous retrouver devant le juge du fond avec une procédure aléatoire qui va durer plusieurs années… Et dans le même temps, votre locataire continue de ne pas payer un centime… Et encore le texte prévoyant la compétence du juge des référés ne dit rien dans un tel cas. Le juge du fond peut-il constater la résiliation du bail après un commandement de payer infructueux après avoir tranché les contestations sérieuses ? Votre avocat en a des sueurs froides…


Heureusement, le principe juridique est clairement posé : le paiement du loyer aux termes convenus est la principale obligation du locataire (Code. civil. art. L 1728, 2°). Ainsi, la Cour de cassation a eu l'occasion dans plusieurs cas de figure de préciser que le locataire ne peut plus soulever de contestation s'il n'a pas réglé celui-ci.


C'est par exemple le cas en cas de contestation du montant du loyer ( Cass. civ. 11-4-1973 : Bull. civ. III p. 200). Ou encore mieux le locataire ne peut pas contester la licéité du bail ( Cass. civ. 11-4-1973 : Bull. civ. III p. 200). Il ne peut pas plus soulever l'inexécution par le bailleur de ses propres obligations (Cass. Civ. 20-11-79 Bull III n°206; Cass. civ. 30-3-1981 : n°80-11399).


Mais il y a quand même, et c'est heureux, un tempérament à ce principe. Le locataire peut se libérer de son obligation du paiement des loyers si et seulement s’il justifie que les manquements du bailleur l'ont placé dans l'impossibilité d'user de la chose louée conformément à sa destination.

En définitive, vous êtes locataire et vous pouvez exercer votre activité dans les locaux, même dans des conditions précaires, alors vous ne pouvez pas retenir votre loyer pour punir votre bailleur de ne pas respecter certaines clauses du bail.


Paye d'abord tu discuteras ensuite.



Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © herreneck - Fotolia.com

Auteur

DAURIAC Eric
Avocat Associé
DAURIAC, PAULIAT-DEFAYE, BOUCHERLE, MAGNE, Invités permanents : anciens présidents
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