Données personnelles

Algorithme et préjudice corporel : publication du décret DATAJUST du 27 mars 2020

Publié le : 31/03/2020 31 mars mars 03 2020

Passé totalement inaperçu en raison de la crise sanitaire liée au COVID 19, un décret n° 2020-356 du 27 mars 2020, publié au Journal officiel du 29 mars 2020, a mis en place un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « DataJust ».
Ce décret autorise le ministre de la Justice à mettre en œuvre, pour une durée de deux ans, un traitement automatisé de données à caractère personnel, ayant pour finalité :
 
  • le développement d'un algorithme destiné à permettre l'évaluation rétrospective et prospective des politiques publiques en matière de responsabilité civile et administrative,
 
  • l'élaboration d'un référentiel indicatif d'indemnisation des préjudices corporels,
 
  • l'information des parties et l'aide à l'évaluation du montant de l'indemnisation à laquelle les victimes peuvent prétendre afin de favoriser un règlement amiable des litiges, ainsi que l'information ou la documentation des juges appelés à statuer sur des demandes d'indemnisation des préjudices corporels.
 
Le décret définit les finalités du traitement, la nature et la durée de conservation des données enregistrées ainsi que les catégories de personnes y ayant accès.
 
Il précise enfin les modalités d'exercice des droits des personnes concernées. 
 
Ces données à caractère personnel et informations enregistrées dans le traitement automatisé seront extraites des décisions de justice rendues en appel entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019 par les juridictions administratives et les formations civiles des juridictions judiciaires dans les seuls contentieux portant sur l'indemnisation des préjudices corporels.

Elles sont constituées par :

1 - Les noms et prénoms des personnes physiques mentionnées dans les décisions de justice, à l'exception de ceux des parties. Il est interdit de sélectionner dans le traitement une catégorie particulière de personnes à partir de ces seules données ;

2 - Les éléments d'identification des personnes physiques suivants : la date de naissance, le genre, le lien de parenté avec les victimes et le lieu de résidence ;

3 - Les données et informations relatives aux préjudices subis, notamment :

- la nature et l'ampleur des atteintes à l'intégrité, à la dignité et à l'intimité subies, en particulier la description et la localisation des lésions, les durées d'hospitalisation, les préjudices d'agrément, esthétique, d'établissement, d'impréparation ou sexuel, les souffrances physiques et morales endurées, le déficit fonctionnel, ainsi que le préjudice d'accompagnement et d'affection des proches de la victime directe ;

- les différents types de dépenses de santé (notamment frais médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation) et d'aménagement (notamment frais de logement, d'équipement et de véhicule adaptés) ;

- le coût et la durée d'intervention des personnes amenées à remplacer ou suppléer les victimes dans leurs activités professionnelles ou parentales durant leur période d'incapacité ;

- les types et l'ampleur des besoins de la victime en assistance par tierce personne ;

- les préjudices scolaires, universitaires ou de formation subis par la victime directe ;

- l'état antérieur de la victime, ses prédispositions pathologiques et autres antécédents médicaux ;
4 - Les données relatives à la vie professionnelle et à la situation financière, notamment la profession, le statut, les perspectives d'évolution et droits à la retraite, le montant des gains et pertes de gains professionnels des victimes, ainsi que des responsables ou personnes tenues à réparation ;
5 - Les avis des médecins et experts ayant examiné la victime et le montant de leurs honoraires,
6 - Les données relatives à des infractions et condamnations pénales ;
7 - Les données relatives à des fautes civiles ;
8 - Le numéro des décisions de justice.
 
La création d’un référentiel indicatif d'indemnisation des préjudices corporels par le biais d'un algorithme, craint depuis quelques années par certains professionnels, fait déjà l’objet de vives critiques.
 
En effet, sous couvert de garantir un traitement égalitaire des demandes, il sonne la fin de l’individualisation du préjudice et le début d’une robotisation de l’indemnisation …
 
 
Cet article n'engage que son auteur.

 

Auteur

Aurélie FILIPPI-CODACCIONI

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